Hypnos (Galandon/Futaki) 1. L'Apprentie

E n janvier 1919, l’Europe tente de dissiper les cendres du premier conflit mondial et d’asseoir une paix durable. Cependant, la révolution a eu lieu en Russie, laissant planer une nouvelle menace. En France, Clémenceau, président du Conseil, ne fait pas l’unanimité. Ses positions idéologiques à l’égard du bolchevisme naissant compliquent ses relations avec le monde prolétaire. Dans ce contexte, Camille Harland, veuve de guerre sans pension et ouvrière, élève seule sa fille. Mais la jeune Adèle est tuberculeuse et a besoin de soins bien trop coûteux. Alors, utilisant des talents d’hypnotiseuse appris auprès de son défunt mari, Camille dépouille un homme riche et influent. La cambrioleuse en herbe commettra quelques erreurs qui la conduiront dans un asile psychiatrique, vers de multiples péripéties.

Laurent Galandon, scénariste d’une trentaine d’albums, plante le décor d’une série ambitieuse et attirante. Bien que centrée sur son héroïne, l’intrigue propose des ramifications multiples, animées par des personnages secondaires dotés d’une véritable épaisseur. On suit alors l’errance psychiatrique douloureuse d’Albertine, l’engagement politique de Félicien et Émile, ainsi qu’une enquête policière bien ficelée. La multiplicité de ces récits entremêlés n’altère en rien la cohésion de l’ensemble et la fluidité de la lecture.

Le dessinateur et peintre hongrois, Attila Futaki, donne vie avec talent et expressivité à cette remarquable histoire. Par un mariage de réalisme et de poésie, il rend le Paris du début de l’entre-deux guerres. Les visages et silhouettes, marqués et en mouvement permanent, doivent davantage à Toulouse Lautrec ou à Otto Dix qu'à l’école franco-belge. Le travail sur les couleurs est également remarquable, offrant des teintes relevant explicitement des codes de la bande dessinée mais disposées de manière plus moderne et géométrique. Futaki dispose d’une large palette picturale dont il fait bénéficier Hypnos.

Au final, ce premier tome, riche en informations et en rebondissements, est totalement convaincant. Il se lit avec plaisir et plante des jalons qui augurent parfaitement de la suite. L'impatience gagne à l'idée de voir Camille en découdre, entre traquenards politiques et échappatoires hypnotiques.

Moyenne des chroniqueurs
7.5