Les reines de sang - Frédégonde, la sanguinaire 2. Volume 2/2

L ’assassinat de Galswinthe puis le mariage du roi veuf avec sa maîtresse Frédégonde ont déclenché une guerre fratricide avec l’Austrasie dont la reine n’est autre que la sœur de la défunte. En 575, après deux années de conflit, les troupes neustriennes sont écrasées et Chilpéric s’apprête à se rendre à son frère Sigebert, mais son ambitieuse épouse refuse de s’avouer vaincue. Elle restera souveraine et éliminera tous ceux qui se mettront sur sa route, peu importent les liens de sang. En face d’elle, Brunehaut entend bien contrecarrer les plans de cette fille de rien.

La série Les reines de sang a pour ambition de retracer les parcours de femmes de pouvoir qui ont marqué l’Histoire, en un ou plusieurs tomes pour chacune. Tandis qu’Arnaud Delalande et Simona Mogovino font revivre la légende noire d'Aliénor d’Aquitaine (cinq tomes sur six parus), que Thierry et Marie Gloris ont produit le diptyque Isabelle, la louve de France et que Philippe Nihoul se penche sur l’orientale Tseu Hi, Virginie Greiner se consacre, elle, à Frédégonde (545-597) dont la cruauté et la propension à semer la mort sur son chemin vers le trône lui ont valu des épithètes peu glorieuses de la part des chroniqueurs contemporains. Un penchant sanguinaire que les manuels de la République n’ont pas manqué, en leur temps, d’utiliser comme outil d’édification, à l’instar du supplice de sa vieille ennemie Brunehaut ou de l’épisode du vase de Soissons, afin d’illustrer les tribulations de la dynastie mérovingienne.

Après avoir montré les manigances de la brune neustrienne issue du peuple pour supplanter les épouses successives du roi Chilpéric, ce second volet s’attache à suivre sa lutte pour détenir seule les rênes du royaume en dépit des revers, des infortunes diverses et de la vengeance personnelle de sa rivale austrasienne. Cette héroïne sombre se révèle intéressante à bien des égards du fait de sa volonté marquée et de son instinct de survie à toute épreuve. Tous les travers et vices qui lui ont été prêtés sont repris par la scénariste qui ne force cependant pas le trait et respecte ce qu’on sait de cette souveraine, y compris son élan de foi. La belle est dangereuse, venimeuse même, et parvient à ses fins en usant de toutes les armes à sa portée, séduction, pleurs et colère en tête. L’album balaie neuf ans d’histoire, mais se concentre surtout sur les cinq premières. La narration est dès lors plutôt rythmée, passant d’un camp à l’autre, transportant de Tournai à Metz en s'arrêtant à Paris ou Rouen ; elle relate les excès de la reine, les gêneurs tombant tour à tour, tandis que les alliances s’inversent.

Le récit est porté par le dessin expressif d’Alessia de Vincenzi, rehaussé des couleurs d’Albertine Ralenti. L’ensemble s’avère agréable, malgré des planches aux cases nombreuses et une multitude de protagonistes – tous reconnaissables néanmoins. Les plans sont variés, même si certains paraissent moins avantageux, et les émotions transparaissent bien. Un soin tout particulier est apporté aux vêtements afin de restituer au mieux l’époque.

Les auteurs remplissent leur office et offrent une bande dessinée qui se lit avec plaisir tout en portant un regard sans fioriture sur une femme que l'ambition a poussé au pire.

Moyenne des chroniqueurs
6.0