Le sac à malices Immersion au coeur d'une épicerie…

A u chômage, Lola a décidé d’occuper ses journées activement. Elle a donc poussé la porte de la Boîte à malices, une épicerie solidaire située à Saint-Pierre-des-Corps. Immédiatement plongée dans le bain, la jeune femme découvre les différentes facettes du quotidien de celles et ceux qui font tourner la boutique. Réception des lots de denrées, étiquetage, accueil des bénéficiaires, mais aussi ateliers divers permettant de maintenir dur lien, l’ouvrage et les rencontres ne manquent pas.

Alors que la paupérisation et la précarité gagnent du terrain, les associations d’aide aux personnes les plus démunies constituent, toujours un peu plus, un secours nécessaire, sinon indispensable. Cette question d’actualité, Thibault Lambert (Le Douanier Rousseau, Si je reviens un jour… Les lettres retrouvées de Louise Pikovsky) l’aborde de front à travers une bande dessinée reportage autour d’un de ses lieux où la solidarité n’est pas un vain mot. Son scénario se nourrit des témoignages et des constats posés par les acteurs de terrain, employés comme bénévoles, et par quelques personnes bénéficiant du dispositif. Avec humour, l’auteur entraine le lecteur à la découverte d’une réalité qui repose beaucoup sur les bonnes volontés, l’engagement à toute épreuve et l’envie d’aider son prochain. Toutefois, les sourires et l’accueil chaleureux n’empêchent ni les contraintes ni les limites de ce système. Par petites touches, le récit souligne également le sentiment insidieux de ne pas en faire suffisamment ou, du côté de Kimberlay, de Samira et des familles aidées, ce mélange de honte, de redevabilité et de fatalisme. Ces personnes précaires sont présentées avec bienveillance et lucidité par rapport à leurs situations respectives. En dépit d’un contexte difficile, du désarroi qui grignote les pensées et de la fatigue d’empathie qui affleure, cet aperçu respire la vie et se veut positif : des mains se tendent de chaque bord de la fracture sociale. Et heureusement. Habilement intégré à la narration, l'historique de Saint-Pierre-des-Corps donne une idée de l'évolution de la commune, de son habitat et de sa population. Enfin, l’album s’achève sur une note festive qui en dit long sur les relations nouées et le besoin de se re-créer en libérant les esprits le temps d’un grand moment de partage où tous s’activent.

Portée par un dessin semi-réaliste allant à l'essentiel, l'immersion proposée dans Le sac à malices se révèle instructive. Un docu-BD pour mieux comprendre le fonctionnement des associations d'aide aux plus défavorisés et casser quelques idées reçues.

Moyenne des chroniqueurs
6.0