Léviathan (Kuroi) 1. Tome 1

"Dans l'espace personne ne vous entend crier" cette phrase culte placée sur l'affiche d'Alien, tous les fans de SF la connaissent. Elle aurait pu être mise en bandeau sur ce premier tome de la nouvelle série débusquée par Ki-oon, Léviathan.

Un immense vaisseau dérive dans l'espace. Des pilleurs d'épaves le repèrent et s'y introduisent. Des indices les amènent à comprendre qu'il s'agit du Léviathan, un paquebot de croisière perdu depuis un moment. Pensant être tombés sur le jackpot en terme de rapines, ces hommes entrent en profondeur dans le navire. L'un d'eux trouve le journal d'un collégien qui était à bord, en voyage scolaire avec sa classe. À sa lecture, les pilleurs comprennent vite qu'il y a probablement un survivant et que celui-ci a survécu à un carnage.

Ce titre est difficile à résumer sans trop divulgâcher. Son auteur, Shiro Kuroi, joue habilement avec nos nerfs. Les premiers chapitres posent le décor et le début de l'intrigue. Le choix de combiner le présent des écumeurs avec les moments du passé racontés dans le journal donne un rythme pesant qui fait monter la tension au fur et à mesure. De plus, le mangaka s'amuse à casser le rythme pour mieux le relancer quelques planches plus tard. La méthode tranche avec la rapidité des récits d'aventures spatiaux modernes pour mieux rendre hommage à des classiques du film de SF. Kuroi sait où il veut emmener les lecteurs, en les faisant errer dans les méandres labyrinthiques du Léviathan en suivant, en parallèle, la chronologie du témoignage du jeune Kazuma et la progression des intrus. Le côté drame scolaire en huis clos peut dérouter, certains éléments divulgués par bribes laissant entrevoir la possibilité d'un prochain battle royal.

L'auteur signe un premier titre à l'image de son parcours assez atypique dans le milieu. Graphiste de formation, Kuroi tente de percer dans la bande dessinée, récoltant quelques succès à des concours tout en essuyant de nombreux refus d'éditeurs. Il se lance alors dans l'animation, en entrant à la Toei. Il y sera chargé de production sur plusieurs séries dont One Piece. Cette expérience de trois ans lui permet de parfaire ses techniques de dessins sur les décors et de manier les outils numériques. Web designer, il publie des magazines vendus lors de conventions, où il glisse ses planches. C'est là que Léviathan voit le jour. Avec un CV aussi alambiqué, pas étonnant que son titre le soit aussi un peu. Le mangaka assume ses sources d'inspiration qui vont du cinéma à Moebius en passant par Otomo. Le trait est à la fois précis et détaillé et serait un mélange de celui de Nihei et de Giraud. Le cadrage est excellent, le jeu des trames également. Le format étant un peu plus grand que la normale permet de mieux apprécier le travail graphique de l'auteur, tout en rendant le récit agréable à suivre.

Un premier manga prometteur tant pour l'aspect graphique et esthétique que pour l'aspect scénaristique. Les éditions Ki-Oon frappent fort en ce début d'année avec ce titre, qui pourrait rejoindre les rangs des classiques de science-fiction.

Moyenne des chroniqueurs
6.0