Mauvaise réputation 1. La véritable histoire d'Emmett…

O klahoma, année 1908. John Tacket, un producteur de cinéma, décide de plancher sur le scénario d'un film retraçant le parcours des frères Dalton. Pour que le récit sur un des plus célèbres groupes de hors-la-loi soit retranscrit le plus fidèlement possible, expliquant, entre autres, comment et pourquoi ils sont passés de marshalls respectables à bandits notoires, il a besoin d'un témoignage crédible. Mais pas n'importe lequel : c'est Emmet, dernier vivant de la fratrie, qui accepte de se mettre à table pour vous compter la véritable histoire.

« Ecoutez, bonnes gens, la cruelle
Et douloureuse histoire des frères Dalton
Qui furent l'incarnation du mal
Et que ceci serve d'exemple
A tous ceux que le diable écarte du droit chemin.
»

« Sauf que moi, Bob, deuxième du nom, j'affirme haut et fort que ma famille a toujours été honnête. » N'en déplaise à Morris et à Goscinny, mais si Lucky Luke, célèbre personnage fictif de la bande dessinée, dégainait plus vite que son ombre face au quatuor le plus redouté du Far West, il le devait uniquement à l'imagination et à l'inspiration du duo d'auteurs. Caricaturés, brocardés, souvent présentés comme des crétins, les nombreuses péripéties du gang Dalton ont amusé toutes les générations de lecteurs, faisant rire petits et grands encore à ce jour. C'était l'objectif affiché, intentionnellement bien différent de ce que fut la réalité.

« Tagada, tagada, voilà les Dalton
Tagada, tagada, voilà les Dalton
C'étaient les Dalton
Tagada, tagada, y a plus personne
»

Si, il y a Antoine Ozanam pour relayer une confession forte et en définitive, pleine de compassion, parce qu'elle relate par dessus tout, une trajectoire, comprenant ses forces et ses faiblesses. Les préjugés et les idées reçues, il était déjà parvenu à les balayer dans son très bel hommage rendu à Popeye, Un homme à la mer. Découpé en chapitres, eux-mêmes délimités par des "unes" de journaux spécialement créées pour l'occasion, l'ouvrage plonge dans les souvenirs inaltérables et douloureux d'Emmet, ultime survivant de la famille Dalton. Il y évoque son parcours atypique ainsi que ceux de Robert, Gratton et William, d'abord en qualité d'honorables citoyens au service de leur nation avant de s'achever quelques années plus tard dans la crapulerie et le sang, contre leur gré, le mauvais sort s'acharnant tel une balle perdue. La vérité, si elle est édifiante et claque comme les portes d'un saloon prises dans un gros courant d'air, se dévoile rapidement pour capter aussitôt l'attention et l'intérêt, ne laissant aucune chance à l'ennui et au superflu de pouvoir s'installer.

Un dessin se regarde. Celui d'Emmanuel Bazin se contemple ! Faisons fi des imperfections remarquées sur les faciès pour souligner le travail remarquable effectué sur les décors, sublimés par des pastels de vert, de noir et de blanc. L'auteur, qui réalise ses premières armes, fait mouche et invite à participer au drame qui se joue dans ce premier épisode. La couverture, échantillon représentatif d'une succession de superbes planches, donne le ton et démontre toute l'étendue de son talent.

Biographie chronologique poignante, Mauvaise réputation corrige le tir et remet le lecteur dans le droit chemin.

- Couplet et refrain extraits de la chanson « Les Dalton » interprétée par Joe Dassin -

Moyenne des chroniqueurs
6.7