Les artilleuses 2. Le Portrait de l'antiquaire

E n 1911, dans une Paname imaginaire, née de la fusion du réel avec l’OutreMonde, êtres humains, trolls, faunes et elfes cohabitent à peu près harmonieusement. C’est dans ce monde singulier que l’élégante Lady Remington, l’impétueuse Miss Winchester et l’extravagante Mam’zelle Gatling exercent la noble profession de voleur. Comme elles ont la gâchette facile, elles sont connues comme "les artilleuses". Les trois délinquantes, attachantes et fantasques, rappellent un peu Arsène Lupin, qui pratiquait d’ailleurs le même métier, dans la même ville, à la même époque. Pendant le braquage d’une banque, le trio s’empare du sagillaire, une bague aux propriétés étranges. Pour conserver le bijou que tous convoitent, les dames affrontent un émissaire du royaume d‘Ambremer, les services secrets français, la police et, surtout, les espions du Kaiser.

L’intrigue du Portrait de l’antiquaire, deuxième tome des Artilleuses apparaît somme toute simple. Certaines scènes de poursuite et de fusillades tendent du reste à s’étirer sur plusieurs pages, sans que cela fasse vraiment progresser l’histoire. Mais peu importe, l’album se révèle jouissif. L’anecdote y cède le pas à la présentation de la Belle Époque servie avec une bonne tranche de fantastique. Les héroïnes ont de la répartie et Pierre Pevel leur offre des répliques truculentes.

Avec leurs chevelures incroyables, les criminelles d’Étienne Willem sont mignonnes comme tout ; les acteurs secondaires affichent pour leur part des bouilles sympathiques, même lorsque ce sont des méchants ou des créatures mythiques au tempérament belliqueux. L’artiste démontre un beau sens du mouvement alors que les bagarres, explosions et chasses à la femme abondent, toujours ponctuées par des onomatopées tonitruantes. Enfin, et c’est probablement ce qui fait le charme du projet, les décors fourmillent de détails aussi anodins que plaisants : un petit dragon perché sur l’épaule d’un monsieur convenable, un café baptisé Le pont du troll ou encore un monstre effrayant interprétant un personnage de Carmen au Palais Garnier.

Pour son galop d’essai dans le neuvième Art, le scénariste a eu la main heureuse en adaptant l’univers qu’il a développé dans sa série de romans Le Paris des merveilles. Sa collaboration avec l’illustrateur de La fille de l’exposition universelle est concluante. Il est à souhaiter que le tandem donne une suite à ce triptyque.

Moyenne des chroniqueurs
7.0