Le jardin secret 1. Première partie

L es Indes, 1910. Alors que la jeune Mary, dix ans, grandit à l'abri dans les jupes de Ayah, sa nourrice, qu'elle tyrannise. C'est normal, c'est une Lennox et une miss. Dans ce pays de sauvages, frappé par le choléra, la gamine grincheuse sera la seule survivante de sa famille. L'exécrable gamine va devoir embarquer pour l'Angleterre. Direction le manoir Misselthwaite, la demeure de son oncle, Mr Craven, qui y habite seul avec ses domestiques depuis la mort de son épouse. Là-bas, elle va devoir apprendre à vivre... et à sourire ?

Après, notamment, l'excellente Bouche d'Ombre (série en quatre tomes avec Carole Martinez chez Casterman), Maud Begon revient avec un projet annoncé en deux albums, à la fois aux dessins (et couleurs) et au scénario. L'autrice a choisi de livrer sa version d'une œuvre anglaise du siècle dernier, The Secret Garden, de Frances Hodgson Burnett (publiée en 1911 et en 1921 pour la version française).

Si la technique a semble-t-il changé, passant au tout numérique, le trait de l'autrice reste identifiable au premier coup d'œil. Rond et expressif, il lui permet de caractériser immédiatement ses personnages, en particulier son héroïne si aigrie. Son dessin s'avère tout aussi à l'aise pour peindre les jardins, les couloirs et les immenses pièces de la demeure ou les paysages grisonnants de cette campagne anglaise et poser de belles ambiances. Tantôt inquiétantes, tantôt mélancoliques ou bucoliques elles donnent à ces séquences une saveur particulière. À la manière du Vent dans les Saules de Michel Plessix et surtout du Jardin de minuit d'Edith, Maud Begon parvient à retranscrire l'atmosphère d'une époque, tout en décrivant avec soin les situations traversées et les sentiments qui étreignent Mary et son entourage.

Découpé en cinq chapitres, son récit monte progressivement en suspens à mesure que les mystères se dévoilent et que l'orpheline explore autour d'elle, maison comme domestiques. Une progression bien rythmée, qui verra la gamine fermée et acariâtre, sans changer du tout au tout, s'ouvrir aux autres. Au fur et à mesure de ce changement elle essayera de découvrir ce que cache son oncle et la disparition de sa femme. Appliquée dans son découpage, l'autrice maintient une lisibilité parfaite grâce à une mise en scène aérée et inventive qui permet de s'immerger pleinement dans cet univers à la limite du fantastique jusqu'à la dernier case.

Adapter un roman n'est jamais chose aisée. Surtout lorsqu'il s'agit d'un classique jeunesse qui, en traversant les époques, a connu les faveurs du petit et grand écran à maintes reprises. Pourtant, pour son premier album seule aux manettes, Maud Begon s'en sort à merveille. Rendez-vous est pris pour la suite et fin.

Moyenne des chroniqueurs
7.0