Herr doktor Herr Doktor - Un destin sans retour

D e retour du front à l'été 1940, le docteur Martin Wisenfall retrouve sa femme et sa fille avec joie. Il espère que la guerre et ses conséquences les épargneront. Et c'est le cœur serré, que face à la montée du danger, il décide de les envoyer à Paris le temps que tout se calme. Malheureusement, lorsque les officiers de la Wehrmacht, qui occupe l'Alsace, déboulent dans son cabinet, son destin change à jamais...

Après un premier tome passé par le financement participatif, Régis Parenteau-Denoël (dessins) et Jean-Francois Vivier ont revu leurs ambitions et livrent la conclusion de leur histoire dans un volume unique, de cent-quatre planches, reprenant celles parues il y a cinq dans. Cette durée est exactement celle pendant laquelle les lecteurs suivent le parcours de Martin Wisenfall, médecin généraliste strasbourgeois. Sur une base historique connue, le scénariste imagine une trame aux allures uchroniques et invite à plonger dans les méandres d'un des moments les plus marquants du conflit, la fin d'Adolf Hitler.

Prenant pour prétexte l'enrôlement de force de leur héros, un « malgré-nous » atypique, le scénariste chevronné immerge son public au cœur d'un conflit qui a souvent les faveurs du neuvième Art. Heureusement, il le fait sous angle surprenant qui, malgré des allées et venues temporelles plus ou moins hasardeuses, rend la lecture rapidement captivante. Cette originalité dans la trame contraste d'ailleurs avec le graphisme classique choisi par le dessinateur. Son trait, rigide mais appliqué, dont les aplats de couleurs sont assurés par Anna (pour l'Acte I) et Joël Costes (Acte II), participe à la fluidité et ajoute à l'immersion.

La première partie, sortie sous le titre explicite La peste et le choléra, fait bien plus que poser les bases de l'intrigue. Elle délivre les éléments d'un thriller dont le véritable enjeu apparaît dans les dernières pages. Avec la seconde, Septicémie, et sa cinquantaine de planches inédites, la tension ne fait que croître et imprime un rythme soutenu à cette fiction. Le suspense, où l'urgence le dispute au danger, suffirait même à passer outre les quelques ficelles un peu grosses qui mènent au dénouement.

Ce Herr Doktor ne manque pas de grand chose pour emporter une large adhésion. Si un dessin moins figé et une plus grande cohérence dans le déroulé auraient été appréciables, l'ensemble n'en demeure pas moins bien mené. Il faut aussi saluer la volonté des auteurs d'aller au bout d'un projet qui, visiblement, leur tenait à cœur et qu'ils ont porté avec passion.

Moyenne des chroniqueurs
6.0