O'Sullivan 1. Mary-Mae

J im Sullivan est un écrivain américain à succès. Au décès de son père, il entreprend de raconter l’histoire de sa famille, depuis la grande famine qui a décimé l’Irlande au milieu du XIXe siècle et poussé près de deux millions de personnes à quitter leur pays. Il se rend dans la ville de ses origines pour effectuer des recherches sur son ancêtre, Mary-Maë. Il sait peu de choses sur cette dame. Elle est montée à bord du Janet Johnson à destination de Québec en 1847 et est arrivée en Amérique juste à temps pour accoucher d’Erwin. Elle enchaîne les petits boulots avant d'aboutir chez une lointaine connaissance, dans la région d’Ottawa, où grandira son garçon.

Rodolphe présente tout d’abord le travail d’un romancier. Ses découvertes sur le sujet, ses rares certitudes, quelques déductions et de nombreuses suppositions. Il explique ainsi que son protagoniste ne puisse pas vraiment écrire la biographie de son aïeule. La jolie rousse sera en quelque sorte l’amalgame de toutes les immigrantes chassées de leur île. Bref, la chronique est celle d’un biographe fictif révélant des épisodes approximatifs.

Le récit est précipité. En un album, le scénariste scelle le destin de son héroïne et entame celui de son fils. Il y avait pourtant beaucoup à dire sur cette mère célibataire, vraisemblablement sans éducation et ne parlant pas français. Était-elle catholique ou protestante ? Dans une société bigote, cette allégeance pouvait faire toute la différence. Le bédéiste s’attarde du reste longuement sur le séjour de l’homme de plume dans son village ancestral et sur ses liens ambigus avec la bibliothécaire qui l’aide dans sa quête. La saga étant prévue en plusieurs tomes, il est possible que ces segments trouvent leur sens. Au terme du premier acte, le lecteur n’est cependant pas vraiment convaincu de leur utilité.

Marc-Rénier demeure un sacré dessinateur. Il transpose le scénario en images, sobrement, sans effet de style, mais est redoutablement efficace. Sa caméra est toujours posée au bon endroit et ses acteurs jouent juste. Il se plaît visiblement à dessiner la capitale québécoise qui, il faut le reconnaître, est photogénique. Son découpage en quatre ou cinq bandes accueille fréquemment des cases occupant toute la largeur de la planche, stabilisant du coup la composition.

Une agréable reconstitution historique, dans laquelle l'auteur gagnerait à prendre davantage le temps d’approfondir ses personnages.

Moyenne des chroniqueurs
6.0