Le ravageur 1. La Hache et le Rêve

B iôrn, valeureux viking et chef de clan, vient de rendre son dernier souffle. Son esprit s'en est allé rejoindre la frairie présidée par le Dieu Odin. Selon les coutumes, c'est à Leid, son fils ainé, que revient le commandement ainsi que toutes les richesses familiales. Mais Gunnar, le cadet, ne l'entend pas ainsi, accusant à juste titre son frère d'avoir déshonoré leur père. Une nuit, guidé par ses multiples rêves de voyages, il décide de quitter la terre de ses ancêtres avec une partie d'un trésor de guerre. La haine et la vengeance viennent d'être scellées, d'autant que l'invitée surprise à l'exode se nomme Solveig, la femme de Leid.

Avec un peu plus de quatre cents scénarii au compteur, Éric Corbeyran règne sur la planète bande dessinée depuis 1990. Une longue carrière durant laquelle sa curiosité et son talent l'ont amené à explorer tous les thèmes et les territoires, qu'ils soient réels ou imaginaires. Tous, ou presque. C'est à Nicolas Bègue, un jeune dessinateur rencontré à l'occasion du second tome de Clos de Bourgogne, qu'il doit l'idée de s'attaquer à un projet inédit : l'univers des pirates scandinaves du VIIIème au XIème siècle. En s'accordant une confiance mutuelle, le duo parvient à livrer une entrée en matière réellement attractive dont la première des qualités aura été de pouvoir délocaliser les personnages centraux pour les emmener en découdre loin de leurs contrées. Si, comme son titre évocateur, La Hache et le Rêve est aussi percutant, ce n'est pas seulement parce qu'il est bien documenté, richissime en informations sur les légendes normandes, en scènes d'action et en rebondissements. C'est également et principalement dû au tempérament singulier du guerrier continuellement chahuté entre la pureté de son âme, ses ballades songeuses et la violence inouïe de ses actes.

Le récit s'avère dense et énergique. Il est traduit par un coup de crayon qui se revendique réaliste et qui ne demande qu'à s'améliorer. Le potentiel de l'illustrateur s'affiche clairement sur des arrière-plans détaillés et fournis. D'ailleurs, Corbeyran l'avoue volontiers, sans détours :« En France, il n'y a plus beaucoup d'artisans comme Nicolas. (...) Je suis sûr qu'il ira loin et j'espère qu'il m'emmènera avec lui ». Compte tenu de la notoriété et de l'expérience de l'auteur, voilà une recommandation que le public se devra de prendre en considération.

Le Ravageur, premier acte d'un diptyque, tranche net avec les habituelles créations du même genre, promettant, à qui voudra bien s'y aventurer, un bon moment d'évasion.

Moyenne des chroniqueurs
6.5