Les fiancées du Califat Les Fiancées du Califat

D epuis que son époux est parti combattre en Irak, Aïcha vit seule à Toulouse. Elle a heureusement un groupe d’amies avec qui elle s’entend : toutes veulent tuer des mécréants. Elle parle régulièrement avec son mari qui convainc le Cheikh Al Kindi de leur confier une mission. Les dames n’ont pas froid aux yeux et, en plus, elles sont rusées.

Matz, auteur de la série Le tueur, s’associe à Marc Trévidic pour raconter un duel opposant les croisées et les forces de l’ordre qui tentent de les empêcher d’agir. S’ensuit un jeu du chat et de la souris ; les agents de la brigade antiterrorisme savent bien qu’elles préparent un mauvais coup, mais n’arrivent pas à comprendre où et quand elles frapperont. Pour tout dire, le lecteur se le demande aussi. Il sera d’ailleurs agréablement surpris par la conclusion de cette histoire construite avec intelligence.

Le scénario aborde de façon originale les relations hommes-femmes. Faisant fi des idées reçues, les scénaristes présentent les musulmanes comme des personnes déterminées et libres de leurs choix. Face à elles, se trouvent des policières et des policiers… Certains, un tantinet misogynes, commettent du reste l’erreur de sous-estimer les comploteuses alors que, dans un bled perdu du Waziristan, un barbu leur accorde sa confiance.

Le dessin réaliste de Giuseppe Liotti sert bien la narration. Son découpage des scènes est particulièrement réussi, qu'il s'agisse d’un attentat occupant les premières pages, ou, immédiatement après, d’une jolie brune qui, s’apprêtant à sortir, prend sa douche, se maquille, revêt un jean, un t-shirt moulant, des escarpins rouges… puis recouvre le tout d’une burqa. En fait, l’artiste parvient à transposer en images la complexité des personnages ; loin de la caricature, les islamistes affichent des airs plutôt sympathiques et ressemblent à tout le monde. Il est d’ailleurs ironique de voir une kamikaze se sacrifier alors qu’elle porte un maillot de sport sur lequel se lit Just do it, la signature d’une icône du commerce occidental. Un bémol, puisqu’il en faut un, peut-être l’illustrateur abuse-t-il un peu des vastes plans aériens, au demeurant impressionnants, qui meublent souvent une planche complète.

Un bon récit, habilement structuré… et étrangement féministe.

Moyenne des chroniqueurs
6.3