Ion Mud

C 'est un vaisseau-monde aux dimensions inimaginables.

Il semble mal en point, comme à l'abandon. Son fonctionnement semble assuré par une armée de drones et robots en tous genres, qui vaquent à leurs occupations sans se soucier des créatures étranges qui commencent à le coloniser. C'est un bestiaire étrange qui se développe dans ses salles gigantesques, comme lorsque l'épave d'un navire devient un lieu de vie pour la faune et la flore environnante. Sauf qu'ici, l'origine de ces êtres vivants est floue. Créatures extraterrestres ? Mutants ? Produits d'expériences scientifiques ratées ?

Au sein de ces gigantesques structures délabrées, un homme survit. Il semble déjà vieux. Dans sa combinaison d'explorateur, il tente de rejoindre sa base. Mais il n'a plus réellement de lien avec cette dernière. Tout ce qu'il peut faire, c'est envoyer, dès qu'il trouve une tour comm' en état de fonctionnement, des messages à ses contacts, comme autant de bouteilles à la mer. Cela fait longtemps qu'il n'espère même plus de réponse. En attendant, il tente d'atteindre une Torana, porte noire et infranchissable, qui lui permettrait de rentrer chez lui. En chemin, il croise d'autres êtres, plus ou moins humains, plus ou moins évolués, plus ou moins dangereux.

Ion Mud est le premier album d'Amaury Bündgen, illustrateur et designer lyonnais venu du jeu vidéo. Sans doute cette expérience explique-t-elle le soin minutieux apporté aux décors. Parfois, le lecteur a davantage l'impression de se trouver face à un art book qu'à un récit. L'univers est étonnant, riche et complexe, mélangeant de manière angoissante technologie et formes organiques. L'auteur assume également pleinement ses inspirateurs graphiques, qui mêlent bande dessinée européenne, manga et comics. Les noms qui s'imposent d'emblée sont d'ailleurs Tsutomu Nihei (surtout), Katsuhiro Otomo, et Moebius. Force est de reconnaître que, quitte à subir des influences, il n'a pas choisi les pires.

Mais, aussi impressionnant que soit le travail visuel, son livre pèche par un scénario un peu court et quelques longueurs. Si le "voyage" dans une machine colossale invite à une certaine forme de contemplation, l'intrigue en elle-même paraît trop passe-partout. La promesse n'est malheureusement pas entièrement tenue. Mais cela peut augurer de belles choses à l'avenir.

Moyenne des chroniqueurs
6.5