Les 5 Terres 5. « L'Objet de votre haine »

S i l’évasion ratée des quatre otages princiers a pu rester confidentielle, l’arrestation du groupe estudiantin entendu en audience privée par Mederion provoque des remous à Angleon. Les notables siégeant au Conseil réclament la libération de leur progéniture, tandis que Terys exprime sa désapprobation au roi. Celui-ci charge alors son Ombre de questionner les prisonniers pour prouver l’existence d’un complot et en identifier les meneurs. De leur côté, inquiets, les autres étudiants font profil bas et pensent à se volatiliser dans la nature en attendant un apaisement, mais en auront-ils seulement le temps ? Au même moment, Astrelia, ramenée de force, est livrée à la Reine-mère, toujours en quête de vengeance.

Après la transition mouvementée au sein de la famille régnante, le quatrième tome des Cinq Terres avait marqué une courte pause, permettant d’observer la manière de gouverner du nouveau souverain, jusqu’à ce que l’action se précipite dans les dernières pages et laisse le lecteur en suspens. Reprenant le récit au lendemain des derniers événements, le trio qui officie sous le pseudonyme de Lewelyn montre un Mederion plus que jamais habile à la manœuvre, maniant aussi efficacement le verbe que l’autorité. Doutes et expectative se heurtent ainsi à un art consommé de la manipulation et à un opportunisme certain, ce qui rend le spectacle de ce jeu de pouvoir particulièrement intéressant et trépidant. La violence se déploie à un autre niveau, avançant masquée, pour n’éclater plus physiquement que dans la deuxième moitié de l’album. Cependant, qu’elle emprunte des biais sournois ou jaillisse dans des affrontements, elle n’en reste pas moins bien présente et engendre des fissures où viennent se glisser colère et détestation ; deux sentiments puissants qui, tant dans l’intrigue principale que dans ses ramifications, font naître la promesse d’une suite aux nombreuses possibilités.

Servant parfaitement cette histoire riche et complexe, la partition graphique partagée par Jérôme Lereculey (au dessin) et Dimitris Martinos (aux couleurs) se révèle encore une fois des plus réussies. Elle restitue avec à propos la force des passions qui animent les protagonistes, soulignant des attitudes ou accentuant les expressions afin de mieux transmettre ce qui sourd dans les cœurs. Que ce soit dans les plans larges ou plus rapprochés, par le biais d’une vue panoramique en extérieur ou intérieur, chaque planche est minutieusement travaillée et détaillée. Des appartements du palais aux rues de la cité, en passant par la caserne, les tavernes, des chambres ou un bateau, chaque lieu dégage une véritable atmosphère et permet une totale immersion.

Mené de main de maître, L’objet de votre haine confirme la très bonne qualité d’une série ambitieuse qui a prouvé qu’elle savait ménager ses effets. D'où viendra le prochain coup ? Réponse dans le sixième opus !

Moyenne des chroniqueurs
6.8