L'accident de chasse

L e jeune Charlie Rizzo fait une connerie qui risque de l'envoyer en prison. Son père est dévasté et est prêt à tout pour lui faire prendre la bonne décision. Il lui révèle alors son secret le plus intime, le plus sombre : la véritable cause de sa cécité. Jusqu'alors, elle était justifiée par un stupide accident de chasse survenu à l'adolescence. Mais la vérité est tout autre et fait vaciller la confiance que son fils lui portait. Ce sont toutes ses certitudes qui volent en éclats.

Inspiré d'une histoire vraie, L'Accident de Chasse impressionne dès la prise en main de l'objet. Très beau livre superbement édité, au contact particulièrement agréable, il évoque directement une forme de nostalgie tout à fait en phase avec ce genre de récit. Très vite, au fil des pages, le charme opère. Le travail visuel se révèle de toute beauté. Le graphisme tout en hachures et textures de Landis Blair traduit parfaitement les zones d'ombre et de lumière qui caractérisent les personnages. Il favorise également une mise en page très éclatée, qui rappelle, si besoin est, que la bande dessinée ne se résume pas un enchainement de cases sur une planche. Au contraire, il s'agit de suivre le fil d'une idée narrative, de la rendre lisible et de favoriser l'immersion du lecteur dans images et textes.

C'est un véritable voyage intérieur auquel nous convie David L. Carson, artiste multidisciplinaire qui signe ici son premier scénario de bande dessinée. Il met en scène un superbe récit de rédemption, relatant la reconstruction d'un homme brisé à travers la littérature et la quête nécessaire du pardon entre un père et son fils. L'Accident de chasse est l'histoire d'une chute et d'une renaissance. C'est aussi une ode à la force de la littérature et à la vérité de l'imagination comme clés pour affronter le monde.

Si le sujet peut sembler rébarbatif, ce livre est pourtant un véritable page turner, qui se dévore littéralement. Il convient d'ailleurs de se demander comment un ouvrage aussi brillant (à l'instar de Maus d'Art Speigelman, Ici de Richard McGuire ou un Moi, ce que j'aime, c'est les monstres d'Emil Ferris) a pu échapper aux éditeurs traditionnels pour aboutir chez Sonatine, dont le catalogue consacré à la bande dessinée est plus que réduit. Ceci lui permet certainement de bénéficier d'une attention soutenue, qui ne peut que lui être bénéfique. En tout cas, il n'est pas abusif d'affirmer qu'il s'agit de l'un des livres de l'année.