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oût 2039, mars 2039, février 2040... les dates se percutent aux évènements dans le monde pré apocalyptique du feuilleton Après la Guerre du trio Brunschwig / Martin / Froissard.
Que raconte cette série ? L’arrivée annoncée de trois gigantesques vaisseaux extra-terrestres se dirigeant vers la Terre depuis des mois ? L’enrôlement des frères Etchevaria dans la formidable armée mondiale qui se prépare à lutter contre cette invasion ? Ou bien l’enquête de routine menée par Gordon, devenu enquêteur privé quelques années plus tard ? C’est à la fois toutes et aucune de ces histoires.
Le véritable sujet d’Après la guerre, c’est bien l’homme. Cet homme qui n’est qu’un fétu de paille vis-à-vis d’un gouvernement policier mondial. Et ce personnage connaîtra différentes phases d’évolution : de l’entrée dans le moule collectif à l’obéissance aveugle, jusqu’à la désillusion et à la survie en marge. Mais plutôt que de nous présenter ces phases d’une façon linéaire traditionnelle, les auteurs ont choisi la confusion : une idée amène à un évènement passé qui lui-même débouchera sur un souvenir intermédiaire... Parvenus au second épisode (sur les 15 prévus) et même si l(es) histoire(s) avance(nt) un peu, un sentiment de gêne persiste à la lecture : est-il normal que l’on doive revenir aux pages précédentes (voire au premier épisode) pour retrouver qui est qui, et entre quels moments se déroule une séquence ?
Certains lecteurs avaient (à juste raison) rapproché le dessin de Freddy Martin avec celui de l’exceptionnel David Lloyd. Et même si on reconnaît l’indéniable avantage de ce style graphique pour illustrer des ambiances sombres et une froide violence, il est aussi évident qu’il n’est pas des plus efficaces pour une représentation des visages et expressions. Difficile de s’y reconnaître quand les traits sont brouillés. Chez Lloyd, on s’y retrouve facilement : les histoires sont linéaires ; pour Martin c’est plus complexe : Après la guerre mélangeant les périodes, si on ne retient pas les noms et surnoms des personnages, les liens qui les unissent, et si on ne se réfère pas régulièrement aux dates rythmant les évènements, bien malin celui qui arrive à suivre le fil conducteur de l’histoire et l'oganisation temporelle des séquence.
Il est toujours désagréable de souligner le manque de lisibilité d’un graphisme intéressant. La ligne claire n’est pas la panacée ; la bande dessinée de qualité s’est plus développée grâce à des expériences osées que par un classicisme conservateur sclérosé. Mais même si un dessin sombre et un découpage déconstruit sont deux ingrédients innovants, leur mélange peut aboutir à un résultat un peu indigeste.
Après la guerre n’est pas une série absconse, trop compliquée et difficile à aborder. Elle manque simplement d’une petite simplification dans sa construction globale, cette bulle d’oxygène qui rendrait sa lecture plus plaisante. Il reste 13 épisodes à découvrir, espérons que les auteurs y apporteront ce petit quelque chose d’aérien.