Le 02/09/2024 à 11:23:36
Il y a quatre ans débarquait d’un petit éditeur réunionnais une jolie proposition, imparfaite mais pleine de passion, croisant de la SF avec l’univers de la folie lovecraftienne. Perçu (et présenté) comme un one-shot, quelle ne fut pas ma surprise de voir débarquer au printemps dernier son petit-frère ! Il faut dire que le premier volume se suffisait à lui-même, nous montrant le principal protagoniste plongé dans un coma de folie après son contact avec une entité d’Outre Espace-Temps… Très différent, ce tome déroule une narration hachée et très sophistiquée visant à raconter l’odyssée dans la folie de cet esprit humain dépassé par des forces incommensurables, alors que lui est révélé le retour de Goz-Anndaroth, l’Être supérieur. Quand le premier suivait un schéma assez classique de SF militaire avec un personnage de membre de la fameuse unité Z, section spéciale chargée de pénétrer dans la « Brûme » où des entités surnaturelles semblaient sorties de notre espace-temps, ce second volume se focalise presque entièrement sur De Cenave, la pauvre victime malencontreusement « touchée » par les forces obscures lors de la dernière insertion… Alors que l’on naviguait jusqu’ici dans une trame temporelle incertains, sans trop savoir si nous suivions un rêve ou la réalité, si les compagnons de la victime étaient toujours vivants ou non, les auteurs pénètrent cette fois totalement dans un voyage multiversiel et spatio-temporel où la progression graphique de Heri Shinato est évidente et permet de somptueux tableaux… mais perdent quelque peu l’esprit SF d’action et surtout les possibilités d’une vraie tension narrative par la disparition quasi-totale de personnages secondaires. Les seize premières pages s’ouvrent dans la suite directe de la conclusion précédente et laissent penser à l’itinéraire d’un rescapé tentant de se reconstruire psychologiquement… avant de basculer totalement dans un autre univers (mental?), dans la plus pure lignée des récits lovecraftiens. La mise est scène est toujours très intéressante en jouant sur la fragilité psychologique du personnage. L’atmosphère générale qui se dégage de la série est pesante, assez dépressive, rendant parfaitement l’état d’esprit de ce pauvre héraut désigné du Grand Ancien. En cela le projet prend de l’ampleur puisque restés sur une incertitude quand à la possible construction mentale de de Cernave, les auteurs assument ici totalement la cosmogonie infernale qui leur permet de jouer avec les trames du Temps, de l’Espace et de la Réalité en promenant notre héros dans des interactions aberrantes, grotesques et visuellement parfaitement réussies, y compris dans le malaise que l’on ressent. En se concluant par une référence évidente à un film majeur de John Carpenter, cette Unité Z s’achève (probablement définitivement) sur cette note bien sombre qui pourra être vue comme légèrement redondante avec le premier tome, comme une sorte de prolongement graphique, esthétiquement très satisfaisant, mais qui tombe dans les limites de tout récit sur la folie d’Outre-Espace. Deux très bons auteurs à découvrir en tout cas et un accueil à réserver malgré de peu de visibilité sur les bacs des libraires… et ce blog est aussi là pour cela! Lire sur le blog: https://etagereimaginaire.wordpress.com/2024/09/02/unite-z-2/BDGest 2014 - Tous droits réservés