Résumé: La vie n’est pas forcément plus simple de l’autre côté des cases.
Après vingt ans de carrière dans le dessin et l’illustration, Geoffroy doit changer de profession.
Sans argent, au bord de la séparation, pour vivre, on lui conseille de trouver un « vrai » métier.
Mais quoi faire quand on a 42 ans et qu’on a tenu un crayon toute sa vie ? De déconvenue en refus pur et simple, Geoffroy saisit la chance qui se présente quand on lui propose un remplacement dans un EHPAD. Lui qui passait ses journées seul à sa table à dessin, se retrouve à faire la toilette à des malades d’Alzheimer, à aider des employés débordés et à faire face à une direction qui n’a pour objectif que de réaliser des profits pour le bien-être des actionnaires aux dépens de celui des pensionnaires.
G
eoffroy dessinateur et illustrateur de métier depuis plus de vingt ans arrive à un tournant de sa carrière quand il se rend compte que sa passion commence à ne plus payer ses factures. Pire encore, le tribunal de grande instance lui suggère de trouver un « vrai » métier pour éponger ses dettes. Après quelques déconvenues et rendez-vous infructueux à Pôle Emploi, il parvient à décrocher un remplacement n tant qu'agent d'accompagnement dans un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Comment laisse-t-on un job artistique pour s'occuper de personnes âgées et malades d'Alzheimer ?
Geoffroy Rudowski livre un récit autobiographique sur ses deux années au sein d'un EHPAD en dressant plusieurs constats : la recherche permanente du profit par la direction au détriment du bien-être des résidents, l'épuisement des équipes avec un personnel de plus en plus restreint, économie oblige !
Cette tranche de vie de l'auteur dresse également la réalité financière d'un artiste peinant à trouver des contrats dans son domaine de prédilection : le dessin. Un secteur de plus en plus précaire et saturé de nouveautés qui laisse de moins en moins de place aux nouveaux arrivants. Signer un contrat est devenu peut relever du "petit bonheur la chance" si la notoriété et le réseautage de suivent pas.
Dans cet album, Geoffroy s'attache à aborder des thèmes forts tel que l'humanité, la générosité et l'engagement des équipes soignantes qui malgré des restrictions budgétaires essayent tant bien que mal d'assurer un parcours de soins le plus qualitatif possible. Cette belle leçon de vie interrogera le lecteur sur l'envers du décor et sur l'activité médicale au sein de ce type d'établissements.
Au dessin, l'auteur choisit une bichromie majoritairement blanche et sépia pour signifier que le temps fait son œuvre dans cet établissement de santé. Quelques cases de couleur grise pour différencier passé et présent de la vie de Geoffroy permettent au public de situer facilement la période retranscrite. Le découpage classique des planches amène une lecture fluide et laisse contempler un trait doux et poétique, teinté de pudeur pour un thème plus que jamais d'actualité sur la condition de fin de vie de nos aîné(e)s.
Après Le plongeon de Séverine Vidal et Victor L. Pinel également chez Bamboo Édition (Collection Grand Angle) où le sujet était centré sur les « pérégrinations » des résidents, Prend bien soin de toi ! se place du côté des soignants ainsi que de la machinerie économique faisant fonctionner un tel établissement. D'une expérience intime et personnelle « Rudo » propose au bout du compte une histoire entre réalité et fiction où chacun trouvera un message susceptible de faire écho à ses propres questionnements.
Conseil de lecture supplémentaire : Ne m'oublie pas d'Alex Garin.
Les avis
Erik67
Le 01/05/2021 à 11:41:34
On apprend que l'auteur qui était un dessinateur de BD a décidé après 20 ans de carrière de changer de profession. On peut supposer que cet art ne l'a pas fait bien vivre ce qui est malheureusement le cas de beaucoup d'auteurs. Sans argent et au bord de la séparation, il décide d'accepter un emploi dans un EHPAD afin de s'occuper de la toilette des personnes âgées atteintes de la maladie d'Alzheimer. Oui, il faut un sacré courage pour opérer cette reconversion professionnelle.
Il va se heurter à une direction qui n'a que pour objectif de faire du chiffre pour satisfaire les actionnaires au dépend des pensionnaires. C'est tout l'histoire du capitalisme. Mais bon, ce n'est qu'un des aspects de cette bd quelque fois assez introspective. En effet, notre auteur souffre d'une certaine dépendance affective lié à son hyper sensibilité ce qui lui jouera de mauvais tour dans sa vie sentimentale.
Notre sympathique auteur fera des rencontres assez intéressantes avec certains pensionnaires dans un milieu où la mort frappe assez souvent. Il y aura des moments assez touchants emprunt d'un humanisme qui fait parfois défaut dans notre monde. On peut apprendre beaucoup des autres.
Cependant, il y aura également du personnel assez félon et des attitudes provenant des familles des pensionnaires assez déstabilisantes. La réalité sera montrée sans enjoliver le propos.
Une mise en image d'une expérience vécue avec une rare élégance dans le trait graphique. Les personnages sont bien définis et les ambiances sont parfaitement rendues. A noter également certaines astuces dans le découpage notamment pour expliquer le mécanisme psychologique de l'hypersensibilité. Bref, un ouvrage lumineux sur la forme.
J'ai beaucoup aimé et cela se traduit par ma note presque maximale. J'en retiens surtout une certaine philosophie de vie à laquelle j'adhère complètement. Un album à ne pas manquer !