Le 25/09/2023 à 12:45:49
Le scénariste et dessinateur Frank Le Gall (série « Théodore Poussin ») a voulu rendre hommage à toute femme victime de violence, au travers de l’histoire tragique de la dernière victime de Jack l’Éventreur, Mary Jane, tuée et mutilée à Londres en 1880. Elle avait 25 ans. Frank Le Gall entreprit de longues recherches historiques pour pouvoir reconstituer au plus vrai le parcours de cette femme qui fut victime de son époque autant que de l’acharnement meurtrier de l’Éventreur. Le dossier en fin de volume montre les recherches graphiques de Le Gall pour les premières planches. J’ai toujours adoré le dessin semi-réaliste de Le Gall et son « Mary Jane » graphique était prometteur. Dans le dossier de fin de volume on comprend que Le Gall a été la proie de problèmes personnels comme professionnels, et ne trouva pas l’énergie de dessiner son projet. Qu’à cela ne tienne, le dessin fut confié à Cuvillier -que je ne connaissais pas. Le traitement est bien-sûr différent puisque Cuvillier joue plus sur les couleurs à l’aquarelle que sur le trait. Mais le récit n’en perd en rien de sa force et la réussite est totale : on plonge dans ce drame injuste, révoltant, en regrettant à chaque page de ne pas pouvoir être là pour sauver cette pauvre Mary Jane de sa longue et inextricable descente aux enfers… Outre ses qualités artistiques et narratives indéniables, l’intérêt suprême de l'album est qu’au travers du portrait de Mary Jane le récit décrit en profondeur l’injustice de la condition féminine dans l’univers écrasant de l’ère préindustrielle à la fin du dix-neuvième siècle. Impossible de ne pas sortir bouleversé de cette lecture.Le 05/12/2021 à 10:02:25
Mary Jane est connue pour être la dernière des victimes du célèbre Jack l'éventreur. C'est toute son histoire qui nous est contée avant qu'arrive cette tragédie. La démarche est assez intéressante d'autant qu'elle a été longuement mûri par un auteur Frank le Gall qui a eu du mal à la mettre en œuvre avant de ressortir le sujet sur la table. Je ne connaissais pas son histoire personnelle : celle d'une galloise qui devient veuve à seulement 19 ans car son mari est tué dans un accident de mine de charbon. Elle va partir pour Londres non sans mal où elle va subir une véritable descente aux enfers au gré de rencontres. Elle devient une prostituée qui croisera la route de gens pas toujours recommandables. Voilà pour le cadre. Il y a le thème que la vie de femme n'était pas chose aisée dans une société qui ne faisait pas de cadeau. Les aides sociales n’existaient pas en ces temps là qu'on ne regrette pas. Il fallait se lever pour aller travailler si on ne voulait pas mourir de faim. On va assister à une lente déchéance d'une femme d'extraction modeste qui était heureuse avant que le destin lui prenne son mari. J'ai eu beaucoup de peine pour elle et j'ai ressenti beaucoup d'émotions. J'ai fort bien apprécié le graphisme réaliste et soigné de Damien Cuvellier qui met très bien en perspective les personnages ainsi que le décor à commencer par Londres l'opulente et ses bas-fonds. On observera une mise en couleur tout en aquarelle ce qui donne le plus bel effet. Un récit triste et poignant à la fois qu'il convient de découvrir.Le 29/02/2020 à 15:33:56
« Mary Jane » se distingue par des dessins superbes et une mise en couleur aquarellée, aux ocres parfaits pour ce Londres mal famé du XIXème siècle. Le style réaliste de Damien Cuvillier donne à certains personnages de vraies gueules d’acteur. L’ensemble de son travail sur cet album est irréprochable. J’ai plus de réserves sur le scenario de Franck Le Gall. Évidemment, ses intentions sont bonnes. Sa dénonciation de la condition féminine de l’époque est intelligemment amenée et sa volonté de mettre à l’honneur les victimes de Jack l’éventreur plutôt que leur bourreau est tout à fait louable. Respectable aussi son traitement distancié du sexe et de la violence. Vous ne trouverez ni voyeurisme ni complaisance dans ses pages. Mais sur le plan narratif, il manque clairement une dimension. Le récit est elliptique (la fuite en France) et le rythme irrégulier, certains passages étant trop longs (la route de Cardiff), d’autres trop courts (1 planche entre la rencontre de MJ avec Joe et son emménagement avec lui). Enfin, les personnages secondaires sont bien présents mais ne sont pas creusés et ne servent pas l’histoire (Peter White, le boxeur, la vieille, Maria…). Ces exemples sont autant de petits déséquilibres qui empêchent la tension de s’installer et tiennent malheureusement le lecteur à trop grande distance du sort de Mary Jane. Cela dit, malgré ces défauts, ça reste une bonne BD, solide et agréable à lire.Le 22/02/2020 à 22:06:41
Nul ne peut envier la vie de Mary Jane dans ce Londres de fin de siècle comme celle de tous les miséreux de l’époque. Pour les femmes qui perdent leurs maris où leurs parents, la vie de prostituée est souvent un recours. Un recours peu enviable et quand Jack l’éventreur erre dans les environs... L’histoire est triste à souhait, les dessins sont de qualité… Rien de nouveau cependant… L’horreur de cette vie omniprésente, le destin de ces femmes solitaires… poignant ! Mais cela a déjà été mieux raconté.BDGest 2014 - Tous droits réservés