A
fin de parfaire son étude des consciences sinistrées, Amodef décide de bâtir Thorinth, une tour si vaste qu'une vie entière ne suffirait pas à en explorer les moindres recoins. Entouré de ses pellegens, docteurs en consciences, il rêve de sonder plus loin que jamais l'esprit de tous les fous qu'il accueille dans sa tour.
Mais c'est un autre rêve que chérit Esiath, l'architecte de la tour, un rêve de puissance. Elle construit en secret un immense bloc d'argile qu'elle peut modeler à sa guise pour en faire le reflet de sa conscience. Elle s'en sert pour absorber les esprits des pellegens réunis et le transforme en un golem très évolué : le garde-fous. Mais celui-ci la transperce et laisse s'enfuir Amodef, seul rescapé de ce carnage, qui ne donnera plus signe de vie.
Bien plus tard, un homme entre dans Thorinth pour retrouver sa femme, Madalis, envoyée en exil dans la tour pour avoir poursuivi ses expériences et sa quête de l'immortalité. Il va y découvrir un monde hors du commun, parfaitement autonome, mais régi par les consciences malades qui l'habitent, un monde où la folie n'est pas un vain mot.
C'est d'ailleurs ce qui fait le charme et la particularité de cette série. Nicolas Fructus est parvenu à créer de toutes pièces un univers cohérent malgré la démence qui s'en dégage. Du roi mégalomane au bouffon manipulateur, de l'artiste maudit aux assassins suicidaires, tous les personnages qui déambulent dans la tour semblent sortis d'un autre monde et leurs motivations ne sont jamais claires. Il n'y a que le héros, le fou sans nom, pour apporter un brin de pragmatisme dans ce délire collectif, obnubilé qu'il est par la recherche de sa femme.
Les retrouvailles tant annoncées dans le deuxième tome (qui tire d'ailleurs un peu trop en longueur) auront donc bien lieu. Il se dégage de Madalis une véritable force de caractère. Même les Schnouboufs s'en trouvent quelque peu éclipsés. Que sont les Schnouboufs ? Simplement de petits êtres, résidus du bloc d'argile qui façonna le garde-fous. Il sont chargés de guider les visiteurs perpétuels de Thorinth dans les méandres sans fin de la tour. C'est donc un univers foncièrement original qui s'offre à nous et qui nous conduit, pour ce troisième tome, au sein d'un empire vertical continuellement en guerre avec le roi de l'horizontal. C'est dans cette région reculée de la tour que se dessinera le destin de Thorinth et de tous ses occupants. C'est là aussi que nous serons révélés les véritables desseins de Madalis.
Pour illustrer un tel univers, il fallait créer une architecture, des costumes et des décors en accord avec la folie de Thorinth. Pari réussi pour Nicolas Fructus qui fait preuve d'une grande inventivité tout au long des trois tomes et n'a de cesse de nous surprendre en explorant continuellement des territoires aux paysages les plus variés. Son traitement de la couleur par ordinateur est lui aussi très particulier, mais très séduisant.
Certes, tout n'est pas parfait dans cette série qui, parfois, manque cruellement de rythme. Trop d'éléments sont tenus secrets et certains éclaircissements seraient les bienvenus pour nous aider à mieux appréhender un univers si déjanté. En outre, on a parfois l'impression que l'auteur a trop d'idées et qu'il peine à toutes les intégrer au récit. Certains passages paraissent quelque peu artificiels. Mais que sont ces légers défauts comparés au plaisir de découvrir une série à ce point originale et personnelle en ces temps de surproduction où tant d'albums semblent inlassablement sortis du même moule ?
Les avis
safedreams
Le 24/01/2006 à 14:46:30
Le 1er tome était excellent et laissait beaucoup d'espoir notamment au niveau de l'univers très original. Le second tome était tout juste bon. Mais le troisième est vraiment très confus. L'auteur aurait beaucoup gagné en simplifiant son histoire. Dommage...