Info édition : Noté "1e Édition" au 4e plat. Luxueuse édition de 128 pages, au premier tirage limité à 4000 exemplaires, à dos toilé et couverture avec vernis sélectif, qui comprend : l'album grand format en couleur, l'intégrale des planches originales encrées par Albert Uderzo (reproductions faites à partir de scans des originaux sauf pour les planches 4, 17, 41 et 44) et un dossier de 32 pages, "Les Coulisses de la création".
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i]Astérix chez les Belges, version luxe, propose trois fois la même histoire. D’abord la bande dessinée que le lecteur connaît depuis 1979, mais 15 % plus grande. Les couleurs ont été refaites et, dès la première case, la comparaison avec celles de l’impression originale est saisissante : beaucoup moins de rouge, le sol passe de l’ocre à un beige davantage réaliste, un pot de fleurs jadis en noir et blanc est colorisé. L’observateur sagace se demandera pourquoi certains vêtements changent carrément de teinte d’une mouture à l’autre, mais, dans le fond, peu importe, c’est de la belle ouvrage.
La lecture du tapuscrit de René Goscinny est fascinante. D’une part, il y a peu de ratures. À cette étape, l’auteur a une idée précise de ce que contiendra chacune des planches (et souvent des illustrations), même si à l’occasion il s’en tient à un « Dans leur style habituel, nos trois amis font irruption dans le camp… ». Une appréciation attentive du synopsis permet par ailleurs de noter des écarts (petits, mais nombreux) avec le rendu final. Le script mentionne un ciel gris alors qu’il sera bleu, Assurancetourix dit LE banquet plutôt que VOTRE banquet (la première proposition est supérieure puisqu’elle met l’accent sur l’exclusion du barde). Certains mots d’esprit, parfois très drôles, sont abandonnés : « Ils font semblant d’être trois, mais ils sont un paquet !», hurle un légionnaire.
La section consacrée aux encrages donne à l’aficionado la possibilité de mesurer toute la finesse du trait d’Albert Uderzo, sans qu’il soit déconcentré par les pigments. Il apprécie la précision du coup de pinceau lorsque l’artiste dessine des tableaux complexes (par exemple une échauffourée), sa grâce lorsqu’il évoque le mouvement et son efficacité pour rendre des personnages en silhouette, notamment César. Paradoxalement, le célèbre pastiche du Repas de noces paysannes de Bruegel l’Ancien apparaît terne en noir et blanc.
Le talon d’Achille de cet album (et de toute la collection) est certainement le dossier. Quelques anecdotes et des éléments biographiques, mais malheureusement pas vraiment plus. Un monument du neuvième Art mérite pourtant mieux. Un texte signé par un exégète qui, au-delà du bavardage, cherche, creuse, analyse et éclaire le propos aurait été le bienvenu. En lieu et place, l’éditeur se contente d’un commentaire léger, pas fondamentalement inintéressant, mais qui est loin de rassasier.
Enfin, le travail d’édition est remarquable : format géant, dos toilé, colorisation impeccable, un seul défaut : le récit en couleurs est imprimé sur un support glacé qui se laisse envahir par les reflets, alors que le noir et blanc est sur un papier mat qui convient particulièrement à ce type d’entreprise.
Le dernier livre du maître n’est pas le meilleur (à quand Obélix et compagnie, Astérix en Corse ou Astérix légionnaire), mais Hachette fait bien les choses, pour un prix raisonnable.