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rphelin, héritier d’une famille de la noblesse britannique, Ciel Phantomhive se trouve, à ses douze ans, à la tête d’un empire du jouet et des friandises. Pour ne rien gâcher, il vit dans un manoir londonien avec ses domestiques et son majordome, Sebastian Michaelis. Celui-ci, stylé, habile et érudit, veille au confort du maître, comme aux catastrophes ménagères provoquées par le cuisinier, le jardinier et la femme de chambre. La visite d’un hôte de marque, puis celle, impromptue, d’Elizabeth, la fiancée de Ciel qui ne rêve que de danser à son bras, donnent l’occasion au factotum d’étaler ses multiples talents sous l’œil émerveillé du personnel. Mais la position sociale du jeune Phantomhive, sa réussite et son don pour se faire des ennemis attisent rancœurs et convoitises, tandis que son appartenance au groupe des « chiens de garde de la reine », luttant contre le crime organisé, lui vaut bientôt d’être enlevé par des mafieux. Aussitôt averti, Sebastian se lance sur les traces de Ciel et déploie des pouvoirs jusqu’ici dissimulés et quelque peu diaboliques, afin de le libérer…
Annoncé comme LA série du moment, très rapidement adapté en animé au Japon grâce à son succès, Black Butler a fait l’objet d’un lancement soigné de la part de son éditeur, dont il vient orner la collection Black Kana. La promesse est donc de taille et la crainte d’une déception forcément proportionnelle. Sans doute est-ce pour cela que certains défauts narratifs sautent d’abord aux yeux, avant même que la montée en puissance du suspense et de la noirceur de l’intrigue l’emporte.
Pourtant, tous les ingrédients d’un bon récit propre à séduire se mêlent allègrement dans ce cadre victorien, au caractère fortement gothique. Tout est parfaitement disposé, accrocheur, ne serait-ce que par la galerie de protagonistes. En effet, entre le séduisant et ténébreux Sebastian, véritable dandy parfait sous tout rapport, et Ciel Phantomhive, enfant désabusé et froid, quoique craquant, il y a de quoi faire chavirer les amatrices de beaux gosses légèrement sulfureux. En revanche, personne ne se détache encore du côté des « méchants », qui paraissent un peu trop falots, et les trois serviteurs, Badroy, May Linn ou Finnian, sont cantonnés à des rôles de faire-valoir, de bouffons sortis tout droit d’une comédie. C’est sans doute ce trait qui ressort le plus du premier tome tant Yuna Toboso semble parodier les contes noirs façon Yuki Kaori, en y ajoutant une bonne dose de fan service. Les trois quarts du volume sont ainsi saturés d’humour et la première moitié tient presque du vaudeville. L’entrée en matière s’avère donc enlevée et légère, tranchant assez avec le synopsis diffusé par Kana. Le contraste se creuse dans la seconde partie de l’album, plus rythmée et plus sombre. Le sémillant Sébastien prend une nouvelle dimension, le mystère s’épaissit autour sa relation avec Ciel et l’histoire semble enfin réellement démarrer, suivant un scénario aguicheur et propre à satisfaire les attentes. Le Diable n’est pas loin ! Enfin, sans pour autant être original, le dessin de la mangaka parvient à faire mouche, grâce son expressivité, son dynamisme et l’allure attrayante des personnages.
Constituant une lecture agréable, le premier volet de Black Butler laisse une impression en demi-teinte, la tournure finale de l’intrigue ne pouvant totalement faire oublier un début mitigé et trop comique. Espérons se fera aussi discret que léger par la suite et que la série prendra la direction plus noire entrevue dans les dernières pages. A noter que le public pourra également découvrir la version animée à partir de janvier 2010.