Résumé: Une nouvelle fois libéré grâce à l’aide de Loess, Floréal décide de contacter un groupuscule de rebelles et de leur communiquer les failles du palais des ministères pour renverser le gouvernement. Son véritable but : sauver Lauren, prisonnière de l’enfer de la reprogrammation. Pendant ce temps, le célèbre biologiste Warnier, revenu d’entre les morts, est recruté par Ternett Industry afin de maîtriser la mystérieuse entité découverte dans l’espace... Il s’agirait d’un virus psychique capable de véhiculer non pas des maladies, mais des idées ! Une formidable capacité dont le pouvoir aimerait profiter afin de contrôler de façon encore plus efficace la population...
Dans la plus pure tradition des grands romans de SF, Metronom’ nous interroge sur des problématiques politiques et sociales intemporelles. Le graphisme époustouflant de Grun, tout en couleur directe, vient conclure en beauté ce récit brillant de Corbeyran, lorgnant du côté des classiques du genre : de Brazil à Blade Runner.
A
insi s’achève cette excellente série de Science-Fiction. Avec ce cinquième et dernier tome, Corbeyran (scénario) et Grun (dessin) offrent un dénouement aux aventures de Lynn, Linman, Radcliff, Loess, Le Président et autres personnages. Leurs destins se sont joués dans une Europe future, sous le joug d’un pouvoir totalitaire qui réduit les libertés et interdit l’Art. Chaque jour les citoyens sont consultés sur une nouvelle loi, qui est invariablement votée. Celle-ci uniformise alors, encore un peu plus, la société. C’est la grande marche, lente mais déterminée, vers la pensée unique et la déshumanisation.
Dans ce contexte froid et oppressant, fort bien rendu par le dessin de Grun, entre Bilal et Pellé (Orbital), la révolte prend forme. Venue des quartiers insalubres, elle fera irruption dans le bureau du Président. Par ailleurs, une représentation théâtrale clandestine scellera le destin des principaux protagonistes. Enfin, la vérité sera faite sur le véritable système législatif du pouvoir, les manipulations scientifiques et l’étrange bactérie qui, au premier épisode, avait rendu fous les occupants d’une navette d’éboueurs de l’espace.
Cet Habeas Mentem, du même niveau graphique et narratif que les quatre premiers épisodes, clôt brillamment Metronom’, série intelligente et dynamique. L’homogénéité de l’ensemble est remarquable. C’est ici que s'achève une histoire qui s’inscrit dans une lignée de récits abordant l’exercice du pouvoir totalitaire, la manipulation de la pensée et la quête identitaire des individus. On y retrouve le cinéma (Metropolis, Brazil, Blade Runner ou, plus récemment, Le Labyrinthe), ou la littérature (Philip K. Dick ou Georges Orwell). Le scénario, ciselé tout au long des 270 planches, équilibre parfaitement suspens, dramatisation, portrait de personnages et interpellation du lecteur.
Dans cet épisode, bien que tous les fils soient rattrapés et dénoués, Corbeyran évite une fin trop fermée et lourdement moralisatrice. A l’instar du conte Le Metronom (le livre dans le livre) qui va semer le trouble dans cette société à la pensée et à la sensibilité asséchées, son histoire vient aiguillonner le lecteur. Il distille des éléments qui incitent à la réflexion sur la norme et la normalité, la gestion et l’utilisation du libre-arbitre, l’éthique scientifique. Ce récit vient solliciter la lucidité du lecteur, mais ne lui impose aucun schéma. Le Bien et le Mal ne sont pas stéréotypés. Tout est question de point de vue, d’intérêt personnel et d’instinct de survie, voire du sens du sacrifice.
Au-delà de cette dimension philosophique et éthique, il y a une œuvre graphique percutante. Des plans larges aux portraits, le trait de Grun est sûr et précis. Les visages de ses personnages, aux traits fluides, sont parfaitement expressifs. Les décors entassent des détails qui tissent une atmosphère étouffante et glauque. Enfin, les paysages urbains sont une orgie de points de fuite, de perspectives, d’élancements, véritables fêtes pour les yeux et l’esprit, même si, au final, l’horizon est bouché. La touche très géométrique de sa cité futuriste, sans arbre, ni plante, ni espace vert, est le miroir de la psyché des individus qui la peuplent. Les lignes y sont droites. Elles pourraient être pures si des brisures ou quelques courbes ne venaient perturber le fantasme de perfection.
Metronom’ reprend l’idée ancienne et bien antérieure à la Science-Fiction, que l’Art est subversif, qu’il est dangereux pour le dictateur et qu’il a pour fonction de mettre un peu de chaos là où l’harmonie d’une société vire à l’uniformisation. Cette fresque, à peine achevée, appelle à la relecture. C’est l’apanage des grandes séries.
Les avis
BudGuy
Le 27/03/2021 à 12:47:38
"Vous votez. Nous luttons. Le vote électronique est la solution."
Avant le très bon "On Mars", Corbeyran et Grun avaient déjà travaillé ensemble sur cette série en cinq tomes, qui bénéficie aujourd'hui d'un intrégral les réunissant.
Le dessin de Grun est très bon, on différencie aisement les personnages entre eux et les filtres de couleur m'ont rappelé des oeuvres de référence telles que 'Blade Runner'. Les dessins pour le conte sont également bien réalisés et s'intègrent parfaitement au récit.
Le scénario réserve son lot de rebondissements et de suspense. Auncun personnage n'est épargné par les aléas du récit et c'est sans concession.
Mes regrets concernent le cinquième tome où l'action se précipite pour vite conclure, certains personnages "disparaîssent" ou on ignore ce qu'ils deviennent.
La fin est en revanche soignée et impitoyable :)
Je finirai par préciser un élément qui m'a le plus marqué à la lecture: la vision dépeinte de la société. En effet, au programme nous avons: vote électronique, couvre-feu, contravention, répression policière, délation de voisin, lois liberticides, censure de la presse, contrôle de l'art, science détournée pour contrôler le peuple, illusion du changement par la démocratie...
La science-fiction rejoint la réalité ! Cette oeuvre n'a pourtant que 5~10 ans mais elle résonne encore plus fortement au vu du contexte politco-sanitaire actuel et cela fait froid dans le dos.
biggyjay
Le 21/02/2016 à 15:50:33
Une fin inattendue pour cette série. La montée crescendo des Tomes 2, 3 et 4 se conclue donc par un final assez brut. Ce final rend la série assez particulière car les personnages auxquels on s'identifie ont tous un devenir que je n'imaginais pas.
Pour conclure, le dessin est parfait, du début à la fin. Le scénario prend un tournant particulier sur la fin qui éloigne les personnages principaux des lecteurs et ternit donc un peu la série. Celle-ci aurait pu être parfaite, ce n'est hélas pas le cas.
aldo 1975
Le 03/02/2016 à 20:04:00
Critique des 5 tomes
Metronom aurait pu être une grande série, malheureusement elle ne tiens pas ses promesses.
La faute à un récit très linéaire et sans grande surprise, à des dialogues sur-écrit et pas naturels, et à un dessin trop figé.
La volonté de perfection des auteurs annihile toute chance aux lecteurs de s'approprier le récit et ses personnages, l'empathie pour ces derniers est du coup inexistant.
Un Métronom sans rythme et sans âme.
MERRY1
Le 23/12/2015 à 21:24:43
Excellente série, avec toutefois une légère chute de tension dans le dernier volume, due à une accélération et à la volonté de terminer la narration peut-être un peu plus tôt que voulu au départ...... Cela est surtout perceptible dans les dernières planches, avec en particulier la 48, dont on se demande si elle n'est pas "décalée" de 2 ou 3 pages.
Pour autant un final qui, tout en n'étant pas un "happy end" laisse entrevoir des jours meilleurs, .... mais sans aucune garantie
kurdy1207
Le 30/11/2015 à 13:40:49
Très bon final à cette série de SF. Dictature, manipulation, reprogrammation de personnes … toute la panoplie d’une histoire qui fait froid dans le dos.
Kubik
Le 26/11/2015 à 18:16:02
En visionnant l' ensemble des tomes de cette série je continue a penser qu'elle ressemble beaucoup a une série SF publié chez Dupuis: "H.A.N.D." il y a quelques années de cela.... et en visionnant ce dernier tome... le design, les "looks" des personnages ainsi que certains aspects du scénario la rappellent de façon encore plus troublante...