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ili et Winker sont des gamins de merde, du genre à foutre le bordel avant de déguerpir. Le monde dans lequel ils évoluent pourrait être le nôtre, avec ces immeubles modernes et ces longues avenues, ces voitures vrombissantes et ces badauds emportés par le train-train quotidien. Il s’en passe pourtant, des choses étranges, que ce soit un mystérieux rayon aux effets peu catholiques ou un labo qui réserve bien des surprises.
Ainsi, les phénomènes étranges se multiplient, tout comme la caméra suit l’un après l’autre les différents personnages. La place des deux héros dans tout cela n’est pas clairement définie, même s’ils sont à l’origine de tous les chambardements. Mais bien vite, ils se retrouvent dépassés, au cœur de l’action, et ne semblent pas avoir de réelle prise sur les événements. Les deux récits – initialement publiés sous le titre Lili & Winker – s’apparentent dès lors à des courses-poursuites effrénées dont chacun essaie de sortir indemne. Le dessin d’Hervé Boivin est sans doute idéal pour illustrer ces scénarios pleins de mouvement et de bizarrerie, tant son trait déformant épouse magnifiquement les contours changeants de protagonistes qui en voient des vertes et des pas mûres. Quant aux textes de David Chauvel, ils ont ce petit quelque chose de délectable, entre une belle rigueur et une discrète élégance.
Si l’ensemble peut à certains moments paraître un rien confus, la cohérence n’en est pas moins de mise, à condition d’accepter cette apparition du surnaturel et de ne pas chercher à tout prix une explication rationnelle. Prenant la forme d’un délire maîtrisé, d’une échappée belle qu’il aurait été dommage de laisser partir au pilon sans réagir, Pretty Little Nightmares a tout d’une incongruité dont les amateurs de choses rares devraient se délecter.