Résumé: Les Mains obscures de l'oubli commencent avec l'histoire de Pascal, un homme de main du milieu marseillais. Dans les années quatre-vingt, il passe un contrat avec un chef d'entreprise basque qui, racketté par l'ETA, refuse de payer. Le deal est simple : si le boss vient à mourir, Pascal doit tuer Itzala, le responsable du rançonnement. À sa sortie de prison, Pascal apprend que le Basque est mort. Et Pascal est un homme d'honneur... Commence alors une plongée dangereuse et désespérée dans une société rongée par la peur et le silence, où une seule chose est sûre : à la fin, les victimes innocentes sont oubliées.
A
ntoine est truand, à Marseille. Incarcéré pour un crime qu’il n’a pas commis, il sort de prison après 30 ans. Pour avoir porté le chapeau, il est en droit de demander plus ou moins ce qu’il veut au parrain de la mafia locale, vieux mais toujours influent. Son premier souci est toutefois d’honorer un contrat passé avant qu’il ne soit envoyé derrière les barreaux. Un homme à retrouver et à tuer, dans la nébuleuse du terrorisme basque.
Le cadre de ce one-shot signé Cava et Seguí est assez inusité en bande dessinée : tandis que le lecteur est invité à suivre les pas du héros à la poursuite d'un haut responsable de l’ETA, c’est tout un univers obscur qui s’ouvre à lui. Car l’intrigue, somme toute assez classique, s’accompagne de réflexions sur le colonialisme et l’identité nationale, traçant des parallèles avec la guerre d’Algérie. Les pensées du personnage central se déroulent ainsi, entre considérations sur l’état du monde et perspectives personnelles, par le biais d’un texte très disert, écrit avec soin. La densité du propos et des mots, pourtant, est une arme à double tranchant, délicate à manier. Parfois, l’auteur trouve le ton juste et la bonne longueur. À d’autres moments, il semble vouloir trop en faire et alourdit inutilement la lecture.
Au final, l’impression est néanmoins plutôt positive, surtout parce que le cœur de l’histoire ne cesse jamais de captiver. L'album offre un véritable microcosme d’êtres humains fascinants à découvrir et une kyrielle de références littéraires et musicales qui agrémentent agréablement les déambulations d’Antoine dans les rues de Marseille, mais aussi d’autres villes que ses activités criminelles l’amènent à arpenter. Tous ces lieux bénéficient, dans leur représentation, du dessin efficace de Bartolomé Seguí. Sans être virtuose, il remplit son office et instaure, par son trait jeté et ses couleurs envoûtantes, des ambiances qui conviennent parfaitement à ce type de récit. Sans oublier une couverture à la composition originale et d’une rare élégance.
Les avis
Erik67
Le 20/11/2020 à 13:45:35
Les mains obscures de l’oubli est un polar dans la plus grande tradition avec celui qui sort de taule après 20 ans pour un crime qu’il n’a pas commis en endossant la responsabilité du fils du chef de la mafia locale. Marseille sera encore à l’honneur. Quel bonheur que d’y vivre !
J’avoue avoir été ralenti par une narration assez bavarde. La fluidité du récit en prend un sacré coup. Cependant, c’est intelligent dans l’écriture et du coup, on arrive à se maintenir non sans effort. Il s’agit de savoir si notre gars va pouvoir honorer sa promesse faite à quelqu'un qui est mort assassiné par l'ETA. Il est en effet question de terrorisme mais également d’honneur.
Autre reproche : la couverture ne reflète absolument pas le propos de cette BD. On a droit à un déguisement sorti du carnaval de Venise pour illustrer une société secrète. J’avoue ne pas avoir compris l’allusion ou le sens profond car je ne fais pas le lien.
Au final, c’est pas mal mais ce n’est pas ce que je préfère.
sulli
Le 27/08/2014 à 16:17:16
Un polar à l’ancienne entre Marseille et le Pays basque
Ce polard noir et ultra réaliste nous embarque sur les chemins du nationalisme basque dépeint ici comme une sorte de xénophobie basée sur la psychologie de la haine et de la terreur de ses supposés ennemis. Une enquête politique bien renseignée et développée qui nous fait traverser une partie de l’Histoire récente.
Les auteurs ont construit un personnage fort et travaillé. Un homme solitaire dont la devise est "ni père, ni patron, ni patrie". L’état d’esprit de ce personnage "old school" imprègne également l’ambiance de la BD. Le trait est rugueux et réaliste. Les couleurs plutôt sombres participent à la noirceur et à la tension de l’enquête.
http://bdsulli.wordpress.com/