Résumé: Pour Élise et Seb, aventuriers fauchés à l'affût du moindre job, les portes battantes du monde du travail s'ouvrent et se referment aussitôt, juste le temps pour eux d'entrevoir ce qu'il s'y passe. Hôtesse de caisse, livreur de pizza, téléphone rose, patrons odieux, clients désagréables, toutes ces situations précaires ont été vécues, testées et désapprouvées par les auteurs.
C
'est Noël, il neige sur Paris. Elise et Seb sont sous le charme nostalgique des flocons, quelques fragments de bonheur avant d'être rattrapés par les réalités de leur quotidien : Compte épuisé. Cette année, il n'y aura pas de cadeaux, pas de fêtes, juste une énième humiliation devant leur famille. Seb et Elise sont bac+5, mais dans la France d'aujourd'hui, ça suffit à peine pour trouver des jobs miteux. Afin de tromper leur attente interminable à l'antenne des Parisiens en difficultés (462 personnes avant eux), ils se remémorent leurs pires moments en tant qu'intérimaires.
Trieur de déchets qui découvre des chiots décomposés dans un sac, bouteille d'Orangina géante qui se fait secouer, testeurs de cosmétiques, assistant surmené d'une feignasse qui passe son temps à geindre devant son Spider Solitaire, en passant par les grands classiques : vendeur, guichetière, caissière, préparateur à MacDo, baby-sitter... C'est un véritable catalogue vécu de la précarité que délivrent Sébastien Marnier et Elise Griffon, tous deux trente-trois ans, dans ce premier album. Si l'humour est bien présent et le trait acéré, le propos s'arrête à l'énumération d'emplois tous plus mal payés les uns que les autres. Salaire net et monde de brutes, chroniques ordinaires du travail temporaire est un témoignage brut des problèmes d'insertion des jeunes sur-diplômés. Il n'y a pas vraiment de recul sur le sujet ou de profondeur qui auraient pu susciter une empathie avec les personnages et générer l’intérêt. En effet, il n'y a pas grand-chose à connaître d'eux à part un goût pour Peau d’Âne et l'évocation brève de leur mésentente avec leurs familles. Il manque un grain de folie, des petits travers, du relationnel, quelque chose qui dépasse l'anecdotique du journal intime pour justifier son titre déjanté et donner de la densité à cette histoire.
Si la lecture s'avère savoureuse au rythme de la publication d'un blog, le traitement un peu trop superficiel de cette chronique de la loose ne tient pas sur le format papier. Sympathique, mais très vite expédié...
Les avis
Erik67
Le 01/09/2020 à 22:51:01
J’ai beaucoup aimé cet ouvrage sur un sujet qui me tient particulièrement à cœur. Il s’agit d’une expérience vécue par les auteurs Sébastien Marnier et de sa compagne Elise Griffon qui a d’ailleurs été à l’Ecole de Charlie Hebdo en ce qui concerne le dessin. C’est traité de manière humoristique afin de faire passer la pilule plutôt amère.
Dans le contexte économique difficile que nous connaissons, les diplômés (c’est-à-dire les bac+5) n’ont pas forcément d’emploi dans leurs branches. Ils sont obligés d’accepter des petits boulots pour survivre. C’est alors que commence les galères car ces boulots de substitution ne sont guère enviables entre se déguiser en bouteille d’orangina ou être secrétaire d’une directrice en mode hystérique ou pire encore en faisant le téléphone rose. Les patrons sont véritablement odieux et les clients insupportables. Les machines peuvent vous écraser les doigts. Bref, tout cela pour un salaire net de misère.
Je dois être sensible car j’ai connu moi-même tout cela avant d’être enfin cadre. Je m’en suis sorti mais pour combien d’échecs dans la société en générale ? Il faut bien comprendre que lorsqu’on choisit la voie de l’université, il faut choisir en fonction des disponibilités sur le marché. Ainsi un bac + 5 en droit général vaudra plus pour un employeur qu’un bac + 5 en cinéma même avec une thèse sur David Lynch. Et puis, il est vrai que la moustache à la Charlie Chaplin pour l'auteur, cela ne le fait pas !
Je trouve courageux la démarche de ces auteurs qui ont accepté ces petits boulots de misère. Il ne faut pas oublier qu’à côté de cela, il y a une grande masse de gens qui ne veulent pas travailler en acceptant ce type d’emploi. J’ai d’ailleurs connu ce qu’on pourrait aisément nommé un parasite sans diplôme qui refusait systématiquement du boulot après 6+ ans de chômage car il voulait absolument devenir fonctionnaire sans passer de concours bien sûr. Et vous savez quoi ? Cela a bien fonctionné à force car l’année dernière, il a décroché un super poste à l’université. Depuis qu’il a obtenu sa titularisation, il est en arrêt de travail très fréquemment et inutile de préciser que ce n’est pas une flèche dans son travail. C’est cette double France qui est actuellement à l’œuvre. Les gens en ont réellement marre.
Après 10 ans de travail précaire, ces auteurs ont également pu s’en sortir. Je suis très heureux pour eux. Quelque chose ne tourne plus rond dans cette société qui produit de plus en plus d’inégalités. Le patrimoine cumulé des 1% les plus riches du monde dépassera en 2016 celui des 99% restants. Il est clair que tout est un problème économique à la base. Il s’agit de donner du travail à des millions de gens avec un salaire net correct afin d’éviter les dérives comme par exemple des attentats sanglants. Ce n’est malheureusement que le début !