Info édition : Noté "D/2011/0089/152". Avec jaquette.
Mois de sortie de l'album repris en DL à titre indicatif.
Tirage de Tête numéroté de 1 à 777.
Enrichi d'un dessin inédit signé par les auteurs sur papier Modigliani 260g.
Résumé: Stalingrad, hiver 1942. Une équipe de tournage est envoyée à Stalingrad, au coeur de la "mère" de toutes les batailles urbaines, pour y filmer la grandeur de l'armée soviétique. Entre les allemands à portée de fusil, les autorités militaires qui ont mieux à faire et le font savoir, un réalisateur médiocre et un assistant caractériel, sans oublier le froid, la neige, la vodka, l'âme russe et l'organisation soviétique, le contexte n'est pas des plus propices pour réaliser ce fameux film...
Confronté à mille tracasseries administratives, dans un système où la suspicion est partout alors que la violence et l'âpreté de la bataille de Stalingrad rendent le quotidien invivable, le commissaire politique Kazimir va devoir composer avec les impératifs militaires et la logique implacable du parti.
Un récit d'une grande densité, qui interroge la place de l'artiste dans un régime totalitaire.
S
talingrad. Fin 1942. La contre-offensive de l’Armée rouge a débuté. Elle doit lui permettre de remporter la victoire finale contre l’ennemi allemand, ce à n’importe quel prix. C’est cet enfer urbain que rejoint Kasimir, commissaire du peuple. Mandaté par Staline lui-même, il doit produire un film, en vues réelles, sur la grandeur des troupes soviétiques. Réussir ou ne pas revenir, tels sont les ordres. Pour filmer la bataille, il s’est vu imposer un piètre réalisateur en la personne de Jaroslav. Ce cinéaste, alcoolique, dilettante et lâche, a pour seule qualité d’être le neveu du célèbre et redoutable procureur Vichinski, l’homme des purges staliniennes. Afin d’assurer la réussite artistique de sa mission, Kasimir compte sur la présence de son ami Simon, qu’il a réussi à sortir des camps de rééducation. Simon, ancien directeur du centre cinématographique soviétique, doit justement sa déchéance et sa condamnation à Jaroslav. Pour espérer obtenir sa réhabilitation, il se doit de coopérer. Pour les guider sur le front, le haut commandement leur a attribué Igor, jeune soldat encore idéaliste. Ce dernier verra ses illusions se confronter à la réalité du système.
Méprisé par les militaires, aux préoccupations beaucoup plus matérielles, pris au piège du jeu politique, affrontant l’absurdité kafkaïenne d’une situation où sa vie peut dépendre d’un nombre précis de bobines fournies, Kasimir doit en plus gérer les antagonismes de ses acolytes. Comme toujours, la petite histoire prendra le pas sur la grande. Cette première partie, après avoir installé le contexte et les forces en présence, abandonne le lecteur sur une situation bien mal engagée. Il faudra attendre la fin pour savoir de quelle manière ce quatuor maudit se sortira de ce guêpier, et à quel prix.
Sept ans après ses débuts en bande dessinée, Frank Bourgeron, au dessin, nous revient avec une histoire au thème proche de celle qui l’a révélé, Extrême Orient. Un pouvoir totalitaire, et, perdus au milieu d'un événement trop grand pour eux, des individus s’affrontant afin de survivre et de tirer leur épingle du jeu. Pour la première fois, l’auteur travaille ici sur le scénario d’un autre, en l’occurrence Sylvain Ricard (Les rêves de Milton, Guerre Civile), déjà cité dans les remerciements de son premier album.
L’histoire en elle-même souffre des faiblesses habituelles des premières parties de diptyque. Se contentant de poser sa trame, elle n’offre au lecteur d’autre choix que d’attendre la suite pour réellement profiter de l’intrigue principale et enfin assister à la résolution des problèmes posés. Heureusement, la nature des liens qui unissent ou opposent les personnages est suffisamment forte et intéressante pour nous donner envie de lire le dénouement. Et même si le scénario ne s’inspire pas complètement de faits réels, la retranscription de l’époque est prenante et surtout fidèle aux ambiguïtés qu’elle ne manquait pas de receler.
Au dessin, Frank Bourgeron nous emmène vers une mise en scène théâtrale. Si nous retrouvons ses personnages si particuliers et sa propension à utiliser de grandes cases verticales, il faut noter son travail sur les décors. Très vite, ceux-ci se font de plus en plus discrets, s’effacent, et ne laissent d’eux qu’une empreinte fantomatique. L’attention se reporte sur le jeu des protagonistes qui finissent par porter à eux seuls le poids du récit. Nous sommes au théâtre. Quoi de plus normal pour un sujet traitant des artistes russes de cette époque.
Si nous sommes loin de l’heureuse découverte qu’avait été Extrême Orient, il y a un certain plaisir à retrouver le graphisme de Frank Bourgeron au service du scénario de Sylvain Ricard. Ne le refusons pas et espérons que la partie finale sera à la hauteur de nos espoirs !
Lire l'interview : Tirez, vous êtes filmé
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Les avis
Erik67
Le 21/12/2020 à 12:47:04
Cette histoire de tournage de film pendant le siège de Stalingrad ne m’a pas particulièrement passionné. Pourtant, j’avais aimé le film Stalingrad et je sais que le sort de la Seconde Guerre Mondiale s’est joué en partie dans cette ville. L’idée était intéressante mais on s’ennuie très vite à la lecture. Les personnages enchaînent des dialogues et se disputent sous le fracas des balles ennemies etc…
On a très vite envie de sortir de cette bd stérile qui n’apporte pas grand-chose. On ne se sent pas impliqué et l’intérêt diminue très vite. Bref, il y a des œuvres qui sont passionnantes et d’autres qui ne le sont pas. Ce ne sont pas les lecteurs qui ont un problème mais la façon d’amener le récit. Bref, la réalisation serait en cause. Un comble pour une histoire de tournage…
dixsept
Le 01/11/2011 à 16:45:19
Le camarade Staline veut un film à la gloire de la mère patrie, exaltant le courage des troupes soviétiques lors de la bataille de Stalingrad. Pour cela Kazimir, Yaroslav, Simon et Igor doivent coopérer mais tout les sépare sauf peut-être le camp de rééducation qui les guète s’ils échouent !
Sur fond de totalitarisme et de Deuxième Guerre mondiale, Franck Bourgereon et Sylvain Ricard nous livrent un bel album qui réussit à mettre la guerre en arrière plan pour privilégier une approche plus personnelle centrée sur les rapports que sont tenus de lier 4 hommes le temps d’un tournage et ce malgré leurs différences et leur l’aversion réciproque. Nulle considération stratégique ou militaire donc mais simplement les ravages et l’omniprésence de la pensée unique qu’imposa Staline … sans oublier la vodka, compagne indispensable au soldat qui lui permet de s’endormir et d’éviter de penser dans cet enfer de glace. L’ensemble est justement et sobrement mis en valeur par le dessin de Franck Bourgeron qui possède toute l’expressivité requise pour traduire les tensions entre les personnages et mettre en évidence la dimension tragiquement théâtrale de ce champ de bataille.
Un joli album en vérité qui en appelle un autre… normal pour un diptyque !
Lartenbulles
Le 26/08/2011 à 20:01:31
Une manière originale de traiter cet épisode mythique et si important quant à l'issue de la guerre 39/45. Un récit entre petit courage et grande lâcheté, entre égo démesuré et dévouement total, accompagné d'un très bon dessin semi-réaliste qui s'attache très bien à rendre les ambiances tendues qui règnent entre les personnages d'un même camp quand l'horreur est quotidienne.