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n poète trublion tchèque dont le grand cœur n’a d’égal que sa volubilité, retrouve, en cette année 1918, un peintre romantique. Tous deux, soldats de la légion tchèque, sont ballotés entre les atermoiements d’une guerre qui se veut mondiale et la révolution Bolchévique. Entre Novosibirsk et Vladivostok, l’armée dont ils font partie, forte de 70 000 hommes, va tenter de quitter la Russie pour rejoindre la mère patrie. Une aiguille dans la botte de foin que fut la construction de l’Europe, entre rencontres fortuites, fuites en avant, et drames humains.
Le titre énigmatique et le thème quasi-inconnu pour le commun des mortels ne peuvent qu’intriguer. Cette Légion Tchèque a-t-elle existé ? Le sous-titre lève toutes les interrogations, Kris est passé maître dans l’art de traiter l’Histoire à travers le prisme de l’individualité, romancée ou non (Notre Mère la guerre, Un homme est mort, Coupures irlandaises). Avec Svoboda, il va encore puiser dans le patrimoine historique pour construire un récit basé sur la réalité et l’enrober de fiction. Le souffle épique d’un rail movie sur un tracé mythique, le Transsibérien, est alimenté par les caractères particulièrement travaillés des personnages. Des troubadours follement poétiques insufflent un air de gaité faussement insouciant qui banalise presque la guerre et fixe l’attention sur le sujet principal de l’album : les êtres humains communs transcendés par une situation exceptionnelle. Les relations entre les différents protagonistes, principaux ou de passage, créent une ambiance propice au développement d’une série faite de sang, de rires et de larmes, crédibilisée par le fondement réaliste de son ancrage et la consistance de ses héros.
Jean-Denis Pendanx abandonne la couleur directe pour revenir à une technique plus classique que nécessitent les trépidations de Jaroslav Chveïk, l’écrivain, et Pepa, le peintre. Alors que Jeronimus et Abdallahi présentaient des tableaux magnifiques et chatoyants, Svoboda ! est bourré de dynamisme qui impose un trait plus libre pour accompagner les mouvements incessants. Le dessinateur adapte son graphisme aux circonstances, passant de l’esthétisme au rythme forcené de changement d’expression des visages, tour à tour joyeux, colériques, sérieux, avinés ou chantant. Les décors, pourtant très détaillés, passent au second plan et ne laissent que peu de souvenir après la première lecture, tant le regard est focalisé sur les yeux, les plis et les contorsions des visages. Un retour sur les planches permettra néanmoins d’admirer le souci du réalisme qui rappellera le voyage en Sibérie de Corto Maltèse de Pratt, mais également celui du Docteur Jivago de David Lean.
Une fresque que mériteront ceux qui n’hésiteront pas à se lancer dans une aventure qui comportera neuf épisodes. Osez ce premier tome et donnez une chance à la vie, l’amitié et l’amour pour qu’ils bousculent le train de l’Histoire.
La preview
Les avis
Erik67
Le 23/11/2020 à 18:22:34
Il n'y a rien à faire car j'aime franchement le style de Kris. C'est un beau conteur d'histoires qui s'imprègne de réalités historiques plutôt méconnues du grand public en l'occurrence la transhumance d'une armée tchèque à travers la révolution russe pour rejoindre leur patrie à créer sur les restes de l'empire austro-hongrois. L'intérêt est de découvrir des pans d'une histoire non étudiée et qui sort alors du lot conventionnel. J'ai également apprécié le trait tout en douceur du dessinateur ainsi qu'une colorisation plutôt réussie. Bref, cela fait plaisir quand il y a cette harmonie entre le fond et la forme.
Les personnages sont sympathiques et on s'imprègne assez rapidement de leur psychologie. C'est une grande aventure humaine dans une Europe marquée par la guerre. Il faudra faire attention à des flash-back qui situent le récit en trois temps : début de la première guerre mondiale, pendant cette première guerre mondiale et à l'aube de la seconde guerre mondiale où l'on devinera la disparition de l'un des trois héros. Le regard sera sans complaisance et je reconnais bien là le style de l'auteur. On suivra avec plaisir cette nouvelle série qui promet.
jacphil
Le 10/10/2016 à 11:48:47
Une bonne bande dessinée mais on attend avec impatience le tome 3 ??? Quelqu'un a-t-il des nouvelles ?
Hugui
Le 17/07/2011 à 11:38:35
Un récit historique comme je devrais les aimer, sur un épisode que je ne connaissais pas de la première guerre mondiale, la transhumance d'une armée tchèque à travers la révolution russe pour rejoindre leur patrie à créer.
Très bien construit comme toujours chez Kris, avec des sauts entre les époques bien amenés pour qu'on s'y retrouve sans difficulté, et un tricotage réussi entre la grande histoire qu'on apprend et la petite romancée.
Pourtant je n'ai vraiment accroché qu'à la toute fin avec le rebondissement final, jusque la j'étais un peu gagné par l'ennui dans lequel baigne les protagonistes.
Et le dessin participe à cette ambiance morose, avec des tons bistres et des trognes biens vus. Bref atmosphère militaire bien rendu mais pas réjouissantes. S'agissant d'un album de mise en place, j'attendrais la suite pour juger si ce voyage au long court ne s'éternise pas au long des neuf tomes annoncés.
DixSept
Le 26/06/2011 à 14:29:50
Soldats sans illusion d’une armée sans pays ; ballotés dans une Europe en guerre qui ne sait que faire d’eux, Jaroslav ChveÏk et ses compagnons d’infortune doivent traverser une Russie en proie à sa Révolution pour embarquer vers la France … à Vladivostok (!)
Au travers des destins croisés de Jaroslav, Pepa ou de la belle Nora, Kris sait prendre le temps de nous décrire l’existence de ceux et celles qui, quelque part, firent l’Histoire de ce début du XXème siècle.
Au gré des pages, à la faveur d’un souvenir ou d’une relecture de note … le réalisme du dessin de Jean-Denis Pendanx sait lui aussi rompre la linéarité du récit grâce à une mise en couleurs qui se joue du temps présent et des différentes séquences du passé.
Un récit un rien cynique et désabusé sur les déboires et les vicissitudes méconnus de cette division perdue.
A lire et à suivre.
roquevidal
Le 14/06/2011 à 15:47:38
L'histoire et les personnages se mettent en place dans cet album avec quelques flash back qui permettent de bien comprendre la psychologie des personnages. Voilà qu'on se prend de sympathie pour eux et patatra.. On arrive à la fin de l'album qui arrive beaucoup trop vite (c'est le principal défaut).
Pendanx revient à un dessin plus traditionnel et Kris livre une histoire basée sur une grande aventure humaine.