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illiam Lapoire a été condamné à mort pour avoir pris la place du roi pendant que celui-ci était aux Croisades. Arrivé en Enfer, le Diable lui propose un contrat : il aura la vie sauve en échange de menus services. Plus particulièrement, il est chargé de ramener des âmes célèbres pour redorer l'antre de Méphistophélès. Lapoire n'étant pas l'individu le plus débrouillard, toutes ses tentatives finissent immanquablement en catastrophe, remettant à plus tard sa libération.
La mécanique de la série est bien huilée. Dans un style qui peut rappeler les premiers récits de Robin Dubois du duo Turk et De Groot, Ernst (souvent accompagné par Didgé au scénario) promène son héros dans le temps et l'espace à la rencontre de « clients » potentiels. Martiens de passage, Sherlock Holmes, un champion olympique, le ton est à la fantaisie pure et à la rigolade, même si la destinée du protagoniste principal n'a rien d'enviable. Il faut dire qu'au grand dam de Lucifer, celui-là n'y met pas beaucoup du sien ! Même si les anecdotes ont gardé beaucoup de fraîcheur, elles sont néanmoins marquées d'une tendance à la répétition du motif, signe, s'il en est, qu'il s'agit avant tout d'une série pour enfants.
En plus de quarante ans de carrière, Serge Ernst a su faire évoluer son art tout en restant fidèle à une certaine idée de la bande dessinée jeunesse. Ses premières réalisations publiées au sein du Journal Tintin, tels les célèbres Clins d’œil, se signalent par un humour souvent absurde – William Lapoire n'en est également pas dénué - dont la bonhomie cache souvent un fond plus grave. Même si l'auteur jouit d'une notoriété reconnue, ses albums n'ont pas toujours rencontré un grand succès en librairie. Ernst est l'exemple typique du dessinateur de magazine qui arrive à s'imposer sur quelques pages, mais peine à convaincre sur quarante-six planches. Résultat, ses premières créations ne sont plus guère disponibles. Heureusement, fidèle à sa mission de défense du patrimoine, Les Éditions De Varly ont rassemblé des histoires inédites dans En plein dedans ! La démarche est louable, mais souffre d'une réalisation éditoriale médiocre (papier, impression, reliure). Espérons que cela ne dissuadera pas trop les bédéphiles nostalgiques.