Le 25/07/2025 à 11:43:30
Après une étonnante série d’albums de grande qualité qui ont installé son esprit aussi acide que drôle auprès du grand public, Bruno Duhamel s’associe depuis deux ouvrages avec des collègues, histoire de souffler un peu sur la réalisation de ses BD. Si la précédente nous faisait nous interroger sur l’abandon du scénario par celui qui a brillé en solo, l’association cette fois avec le très bon David Ratte au dessin, retrouve l’esprit original mélange d’absurde et de satire socio-politique méchante. Avec sa technique invisible sous un style semi-réaliste mais redoutablement juste, Ratte se fond totalement dans le style Duhamel en dressant des planches au mouvement permanent et au comique de situation tranchant. S’autorisant quelques paysages esthétiques ou plans oniriques, on surprend sur certains personnages un réalisme inattendu qui donne envie de voir ce qu’il pourrait donner sur un basculement dramatique… En attendant on plonge immédiatement dans la relation très bien écrite entre les deux personnages où l’on retrouve la plume acérée de Bruno Duhamel. Les dialogues impactent immédiatement avec des punchlines efficaces et l’action verbale succède à l’action musculaire pour un run sous l’humanisme forcené des auteurs. Ce qui démarque Whisky du reste des BD humoristiques c’est bien sur son cadre social qui aborde sans détour la réalité des SDF. Mordant jusque dans un racisme facile de Théo qui use de sa supériorité organisationnelle, l’album peine en revanche à nous décrocher la mâchoire derrière le running-gag des publicités voulues en contrastes avec le quotidien des clodo. On ne peut pas faire mouche à tous les coups. Aussi brillant dans leur maitrise graphique que dans des dialogues incisifs à chaque instant, les auteurs de Whisky font mouche en brisant l’anonymat des sans domicile et en nous jetant au visage la réalité des réfugies de guerre au-delà des chiffres. Sans jamais renoncer à la dénonciation des petites bassesses humaines ils n’en oublient pas non plus de rappeler que dans ce sombre quotidien des individus (… et des chiens) peuvent briser l’inéluctabilité de l’isolement répressif. Un bien bel album engagé de deux beaux esprits. En attendant l’album solo de Duhamel à venir également chez Grand Angle. Lire la chronique sur le blog: https://etagereimaginaire.wordpress.com/2025/07/14/whisky/Le 29/06/2025 à 16:51:48
Le scénario est signé par le normand Bruno Duhamel (né en 75), un bédéaste aussi à l'aise avec les pinceaux qu'avec la plume, et qui est coutumier des personnages un peu décalés, en marge de notre bonne société. Pour cet album Whisky, il a confié le dessin au franc comtois David Ratte (né en 70) sur les conseils de l'éditeur et le résultat confirme la pertinence du tandem. Les personnages et le canevas : Un vieux SDF, c'est Théo. Un jeune réfugié kurde, c'est Amir. Théo et Amir vont "trouver" un petit chien sympa comme tout qu'ils baptiseront Whisky. Le SDF devient vite papy gâteux, comme tout le monde avec un chien comme celui-ci. Le réfugié, lui, ne supporte pas la bestiole, « on n'a pas assez pour nourrir ». Un animal qui lui rappelle certainement son pays ravagé par la guerre, où les chiens tenaient plus de la hyène ou du chacal que du yorkshire sorti du toilettage. Alors ménage à trois ? Ou pas ? ♥ On aime : ➔ Nos deux compères "vivent" tous deux sous le même pont mais ne partagent pas tout à fait valeurs et cultures, ce qui nous vaut de savoureux dialogues. « [...] - Allez l'arabe ! Au boulot ! - Pas arabe. Kurde. - Ouais, c'est pareil. Au boulot ! » Leur boulot, c'est « du vrai boulot de survivaliste » : chaparder quelques fruits au marché et fouiller les poubelles, tout cela sous le regard bienveillant d'affiches publicitaires pour la nourriture ayurvédique pour chats ou les compléments alimentaires en gélules. Décalage, on a dit ? ➔ Et puis il y a les petites leçons de vie dispensées par le vieux Théo, bougon et réac. « [...] - Tu pas aimer artistes ? - Leçon du jour mon gars ... Si tu veux pouvoir profiter d'un des rares terrains vagues qui existent encore, ne laisse JAMAIS les artistes s'y installer ! Les artistes, c'est l'avant-garde de la bourgeoisie ! » ➔ Côté dessins, une ligne claire classique et bien lisible, avec des personnages croqués comme il faut et bien expressifs. Côté intrigue, on frôle parfois le gentil conte de Noël pour ados (ça se passe en hiver sous la neige) mais derrière cette façade charmante, Duhamel réussit à glisser quelques critiques acerbes sur notre société bien organisée pour vivre confortablement à l'écart de ses sdf. Il faut même plusieurs lectures pour en profiter pleinement. Avec le duo Kurde/SDF qui fonctionne parfaitement (belle trouvaille), le scénario s'avère bien plus malin qu'on ne le pensait. L'album est plein de charme et de poésie (la vie des SDF n'est peut-être pas aussi sympa que cela) et les deux personnages - oops, pardon pour le chien - les trois personnages sont vraiment attachants.Le 23/06/2025 à 07:47:18
Une certaine poésie de la rue où la fraternité est de mise. Un album vif et touchant aux couleurs du whisky lui-même: de belles nuances de bruns qualifient la rue pendant que quelques touches de couleurs vives viennent percutés ce petit monde de misère. L'ensemble est joliment réalisé et l'histoire bien que simple nous embarque immédiatement.BDGest 2014 - Tous droits réservés