Résumé: Un homme, Waldo Maelfait, immense vedette de la chanson française, est assassiné à son domicile. Derrière les murs de leurs maisons, des personnages hypocrites, passionnés, furieux, insupportables, dépressifs, débiles et qui n’ont apparemment rien à voir ensemble, réagissent à ce décès.
En espionnant de maison en maison, et sans jamais voir le moindre personnage, le lecteur découvre progressivement les liens qui se dessinent entre eux, jusqu’à l’identité du tueur.
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aldo est mort ! Oui, vous avez bien entendu, le grand Waldo Maelfait a été retrouvé sans vie à son domicile ce matin. « Les côtelettes de l’aube », « Douces nénettes », « La rumba du bar d’en face », qui n’a pas dansé sur ces airs ou fredonné ces refrains ? La chanson française perd un de ses représentants les plus brillants. Prenons le temps de nous incliner devant l’artiste et n’oublions pas, si les hommes passent, le talent reste.
Pour son premier album, Lorraine les Bains a imaginé une fable à tiroirs farfelue à la limite de la BD expérimentale. Narré sous forme de dialogues sortant de différentes bâtisses, le récit se développe autour des réactions provoquées par la disparition de Waldo, un chanteur de variété extrêmement populaire et à la réputation sulfureuse. Assez énigmatique au départ, une pseudo-intrigue se met en place au fil des chapitres. Le ton est drôle et les réparties bien senties. Astucieuse, l’absence visuelles des protagonistes permet à la scénariste de déléguer une partie du « travail » aux lecteurs : à chacun de se faire une idée des personnages ! Rien d’inquiétant néanmoins, ceux-ci s’avèrent quand même bien définis par leurs parlés respectifs. Même sans avoir jamais vu Betty, les jumeaux, James Butley ou l’inquiétant Gaspard Letor, il est aisé de se les figurer.
Vu la contrainte de départ qu’elle s’est imposée, la dessinatrice a dû développer un grand nombre d’astuces de mise en page pour coucher son scénario sur le papier : jeu sur les polices de caractères, phylactères colorés, déconstruction des planches, etc.. Heureusement, totalement maîtrisé et intégré, le côté conceptuel de la narration reste au second plan. Avant tout, l’auteure a une vraie histoire à raconter et elle s’est simplement donnée les moyens pour la mener à son terme.
Lecture rappelant, toutes proportions gardées, les œuvres d’Eugène Ionesco ou de Samuel Beckett, Waldo surprend et séduit. L’exercice de style se montre abouti, équilibré et, le plus important peut-être, extrêmement amusant à parcourir.