Info édition : Noté "Première édition". Avec 1 carte du voyage et la photo de la Citroën Visa pages 132 à 134.
Résumé: « Je dois partir et vivre, ou rester et mourir » écrit Shakespeare, repris par Nicolas Bouvier en exergue de L’usage du monde. À l’été 1986, quelques mois après l’accident nucléaire de Tchernobyl, Nicolas de Crécy et son cousin ont à peine 20 ans quand ils récupèrent une Citroën Visa moribonde. Ils remplissent la voiture de livres, qu’ils ne liront pas, ajoutent deux sacs de couchage, des cigarettes… et embarquent pour un voyage qui n’a pas de destination, mais doit les mener le plus loin possible. Ils traversent le nord de l’Italie, la Yougoslavie, la Bulgarie et descendent en Turquie, dans un périple qui les confrontent au monde autant qu’à eux-mêmes.
É
té 1986, entre Europe et Asie. Ayant « hérité » (c’était ça ou la casse) d’une Citroën Visa au bout du rouleau, Nicolas et son cousin ont plutôt décidé de faire la route, vers l’Est ou jusqu’où leur voiture les mènera avant de rendre définitivement l’âme. Pour des romantiques de vingt ans, aucun projet n’est trop grand ou trop fou. Au volant d’un bolide de 650 cm³, ils attaquent un long périple à travers la France, l’Italie, la Yougoslavie, la Bulgarie et, ultimement, la Turquie.
Impossible de ne pas penser à L’usage du monde de Nicolas Bouvier à la lecture de Visa Transit : même envie de découvrir, même insouciance face aux dangers et même quête de la liberté et de l’ailleurs. Nicolas de Crécy offre un passionnant « travelogue » autobiographique d’avant internet et des transporteurs low-cost. Évidemment, plus de trois décennies après les faits, la mémoire peut jouer des tours, quelle importance ? L’auteur se raccroche à un passé plus lointain (dont un souvenir d’une sinistre colonie de vacances tout droit sortie de L’Institution de Binet) et propose un récit aux ramifications multiples où un nuage radioactif (l'accident de Tchernobyl est tout récent) croise Henri Michaux et les héritiers d’une idéologie vivant ses dernières années (bien qu’ils ne le savent pas encore).
Le style immédiatement reconnaissable du dessinateur de Yokaï et Haïkus s’impose dès la première page. Paysages, protagonistes, chaque case en fait, fourmillent de vie et de détails. Mieux encore, dès que le soleil se met à taper pour de bon, le trait se met à vibrer sous la chaleur endurée par ces bourlingueurs en devenir. De plus, tous les codes de la BD sont scrupuleusement respectés. De Crécy aurait pu tomber dans la contemplation et se limiter à présenter un carnet de croquis « pris sur le vif ». Ce n’est absolument pas le cas. À la place, il réalise un véritable album dans les règles de l’art. Le découpage et la mise en scène sont au cordeau, la lisibilité impressionnante et le rythme, ou plutôt les rythmes, car à force de sauter d’une époque à l’autre, le temps a tendance à se dilater ou se contracter, ne retombe jamais. Sur un plan purement technique, l’ouvrage est un sans faute.
Introspection, un peu de nostalgique par moments - qui ne le serait pas en se remémorant sa jeunesse ? -, beaucoup d’intelligence dans le propos et une construction narrative savante totalement maîtrisée, Visa Transit est une invitation permanente au voyage. Vivement la suite !
La preview
Les avis
Au Fil des Plumes
Le 04/10/2020 à 14:51:32
Avec Visa Transit, Nicolas de Crécy nous narre son road trip de jeunesse. Dans sa Citroën Visa, il décide de partir en vadrouille avec quelques livres, un sac à dos, peu d’argent et son cousin. Ce volume 1 nous décrit une partie de son voyage. Entre péripéties parfois fortuites et moment de contemplation, Nicolas de Crécy trimballe son lecteur au gré de son voyage. J’avoue que j’ai adoré ce scénario. Je me suis laissée porter par les personnages qui n’ont pas de réelle destination. Je les ai suivi tel un témoin privilégié de leur aventure. Très vite, on s’attache au duo de cousins. Les deux jeunes se montrent téméraires dans leur aventure et j’aime la façon qu’ils ont de cohabiter. Bref, le duo fonctionne plus que bien et on a presque envie d’embarquer avec eux dans la vieille Citroën.
D’un point de vue esthétique, le trait de Nicolas de Crécy est fin et délicat. Il y a de la sensibilité dans ses illustrations. J’aime sa façon de dessiner les visages si expressifs. Forcément, faire une BD sur un road trip exigeait de s’appliquer en ce qui concernait les paysages et les décors. Nicolas de Crécy relève le défi haut la main. Les vignettes sont magnifiques. Cela foisonne de détails et les couleurs bien que un peu pâles révèlent des paysages sublimes.
J’ai donc été séduite par ce premier volume et je vais me jeter sur le volume 2 dès que possible.
https://aufildesplumesblog.wordpress.com/2020/10/04/visa-transit/
Erik67
Le 05/09/2020 à 22:41:44
J'ai trouvé ce récit autobiographique se passant durant l'été 1986 assez intéressant par moments, malgré une certaine monotonie de l'action composée de petites anecdotes.
Quand on est jeune et célibataire, on détient la liberté de faire des choses un peu folles, comme le fait de partir à l'aventure avec une vieille petite voiture retapée pour parcourir des milliers de kilomètres et explorer de nouveaux pays. Il s'agira de traverser la France, l'Italie, la Yougoslavie, la Bulgarie et enfin la Turquie.
Il y avait les ennuis mécaniques. Il y a les livres embarqués. Il y aura surtout un voyage assez étrange, composé par un court passage, car possession d'un visa seulement en transit. C'est un vrai road-movie dans la plus grande tradition.
Au niveau de la construction, j'aurais préféré plus de linéarité, car le récit est ponctué de nombreux flash-back qui nuisent un peu au rythme. Celui concernant la vierge Marie sera d'ailleurs assez édifiant. J'ai bien aimé le mystère de la station-essence disparue. Par contre, le passage de l'homme au casque rouge m'a un peu ennuyé.
Au final, une œuvre assez nostalgique d'une époque révolue, qu'on peut regretter.