Résumé: Las Vegas 69, année 2054. Vegas, C’est Julia Lurrachi, sauvée in-extrémis de la mort par une mère prête à tout pour aider sa fille. Et par une clinique privée aux ambitions des plus douteuses. Vegas, c’est une histoire de femmes diaboliques, de flingues et d’une vengeance à deux visages dans un futur où les seules valeurs respectées sont celles de la plus grande ville du vice…
J
ulia Lurrachi est une teenager qui ne manque de rien, et surtout pas d'electrodrogue dans le système nerveux lorsqu'elle décide de s'échapper d'une soirée en boîte où elle s'ennuie. Inconséquente, blonde, capricieuse, l'archétype de la petite peste riche.
Une créature pénètre dans la propriété du sénateur O'Kelly pour arracher une information à son jeune br... de fils pourri gâté, après avoir mis sur la touche les gorilles sensés assurer sa sécurité.
Quel est le lien entre les deux créatures ?
Futur assez proche, substances psychotropes dont les classes aisées abusent pour tromper leur ennui et se donner les frissons qu'ils sont incapables de se créer par d'autres moyens. Robots-esclaves manifestement doués d'intelligence, et pourtant cantonnés à des tâches avilissantes. Jeune femme recomposée, tant sur le plan physique que psychologique, mais à laquelle on cache ses origines pour mieux en faire un bras armé – mais charmant - efficace et dénué d'états d'âme. Émancipation ultra-rapide du sujet qui devient incontrôlable lorsqu'elle entreprend de reconstituer son parcours d' « avant ». Aucun doute, le lecteur, rompu aux récits d'anticipation ou simple amateur, ne manquera pas de repères à la découverte d'Au revoir Julia. Sur le terrain de la BD, il risque bien de se rappeler le pitch intéressant de Ceci est mon corps ou d'une certaine Carmen Mc C à la peau et au cœur dur, ainsi qu'une flopée de films divers et variés. Alors, Vegas un condensé de déjà-vu habillé façon bubblegum saveur wasabi ?
Sans doute un peu mais, pas fade, il offre de quoi mâchouiller avec un minimum d'enthousiasme. D'abord parce que sa construction, non linéaire, privilégie des séquences suffisamment longues et lisibles, sans abuser de flashbacks à répétition, et évite l'ennui et le sentiment de toujours se voir resservir le même plat. Cela reste de la friandise qui s'apprécie sans faim. Ensuite, la lucidité des auteurs saute aux yeux. Le mode pensum S-F n'est pas activé et ils n'oublient pas d'inclure quelques détails qui coupent court au premier degré. Ainsi, le professeur Fielhed possède sans doute les talents d'un Frankenstein du futur mais arbore le profil de l'Igor qui accompagne si souvent le faiseur de monstres. Quant au lieu dans lequel il opère avec la grandiloquence d'un tout-puissant Créateur d'opérette, il s'orne d'une baie vitrée en forme de crucifix renversé dans un environnement lumineux et pastel. Et puis, quelques bons gunfights assurés par une minette vêtue de cuissardes et moulée dans ses fringues pour une scène, ou portant une pélerine rose Barbabapa qui n'entrave pas ses mouvements pour une autre, ça ne se refuse pas. Joël Jurion quant à lui semble en perpétuel exploration de styles tant ce qu'il propose ici se démarque de sa production précédente. Le punch des scènes d’action et un certain goût pour livrer quelques situations burlesques, au cours desquelles quelques personnages peu glorieux ne sont pas montrés à leur avantage, sont ici manifestes. Une tache tout de même dans le décor : une scène de course calibrée Hotwheels, inutile sur le fond et barbante , dût-elle ne durer que quatre pages, que celle de La menace fantôme (et l'on passe sur l'agencement pour le moins curieux de l'une des planches...).
Taillé pour les petites faims, appréciable et coloré comme une guimauve qui ne manque pas de saveur, Vegas remplit son office avec enthousiasme sur un créneau pourtant bien encombré.