Résumé: Dans un monde post-apocalyptique placé sous la coupe d'un dictateur, une mythique course de la mort à moto est lancée. La (re)belle Savior Serazard entend bien remporter cette course esperant ainsi participer à l'avènement d'un monde meilleur...
L
es éditions Kana poursuivent l'exploitation du catalogue de Leiji Matsumoto (Captain Herlock, Queen Emeraldas, Galaxy Express 999) dans leur collection Sensei. Le lectorat francophone peut ainsi découvrir des pépites et des titres jusque-là inédits du père d'Albator. C'est le cas de V2 Panzer sorti en ce mois de janvier 2022.
Mars en 2087. La planète vit sous la domination du tyran Zuera Zender, après un conflit dévastateur où des milliers de motards ont perdu la vie. Il en résulte un monde où les véhicules à moteur sont proscrits, excepté pour l'élite, ainsi qu'une grande misère pour une partie de la population. L'héroïne de ce manga, Sherazad, a perdu ses parents dans ce conflit et souhaite les venger. Pour ce faire, elle va devoir participer à une folle course de motos jusqu'à la ville servant de QG au dictateur. Ce rallye est semé d'embûches, mais la jeune femme trouvera une aide inespérée.
V2 Panzer est un récit sorti à la fin des années 1980, en deux tomes au Japon. Il est proposé en France en un one-shot de trois-cent-soixante-dix-huit pages, avec une jaquette réversible. Le recto offre une illustration reprenant une partie de la couverture d'origine colorée en jaune sable avec la mise en page de la collection Matsumoto. Quant au verso, il propose une reprise de la couverture VO en couleur. Les fans apprécieront ce clin d’œil au matériel de départ. Graphiquement, la patte Leiji est là. Un personnage féminin longiforme et peu vêtue, un alter ego masculin ressemblant de près à Harlock et un troisième homme petit trapu et japonais. Les lecteurs, habitués aux travaux du maître, retrouveront une galerie de protagonistes secondaires au look déjà-vu.
Le mecha design est hyper soigné et détaillé. L’auteur est un fan de mécanique en tout genre. Les participants à la course doivent rouler sur des machines d'avant 1940, Matsumoto s'est fait plaisir en dessinant de vieux modèles dont il est friand. Sherazad récupère une vieille BSA G14, qui est très réussie sur chaque planche. Concernant le scénario, le mangaka offre un condensé de ses thèmes de prédilection: la stupidité de la guerre et la relation avec le pouvoir et le futur de l'espèce humaine. Cette histoire de science-fiction pointe aussi du doigt quelques soucis écologiques, tout en étant très rythmé et dynamique. Amateur de personnages féminins forts, à l'image de Maetel ou d'Emeraldas, le dessinateur et scénariste attribue un design proche de ces femmes à sa Sherazad, tout en lui donnant un côté espiègle qui tranche par rapport aux deux autres. Entêtée et malicieuse, elle a aussi un caractère entier qui la mènera à la confrontation finale contre Zender.
Ce dernier point est peut-être le seul bémol du titre, puisque cette confrontation attendue depuis le milieu du manga est très rapide pour aller sur une fin ouverte. Les autres acteurs principaux et masculins sont peu développés et servent de side-kick, ce qui est une inversion notable dans l'univers de la SF jusqu'aux années 2000. Toutefois, leur offrir un peu plus d'ampleur aurait pu amener davantage de profondeur à l'histoire. A la lecture, la volonté de créer un récit à la fois sur des thématiques qui lui sont chères et qui aurait un côté rock'n'roll saute aux yeux. Un Mad Max édulcoré guidé par une belle rebelle en quête de vengeance et de liberté.
V2 Panzer est un titre dynamique, livrant un agréable moment de lecture grâce au savoir-faire de son créateur.