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ose est à Kyõto pour l’enterrement d’un père qu’elle n’a jamais connu ! Ici plus qu’ailleurs, elle peine à s’épanouir. La colère, la rancœur, l’absence tressent encore et encore le fil de son existence. Que fait-elle donc ici ? Peut-être est-ce l’occasion de s’ouvrir à une nouvelle vie et de bouton devenir fleur ?
S’inspirant du roman éponyme de Muriel Barbery, Kan Takahama se livre à une délicate adaptation d’un récit qui se démarque par l’indicible des sentiments et une fascination pour l’urbanité kyotoïte ! Cela étant, quoi de mieux qu’une dessinatrice japonaise pour transposer une telle histoire ? Car au-delà du trait, il y a une symbolique qu’il convient de retranscrire sans en dénaturer la subtilité, ni la sensibilité. La mort, l’amour, la vie, le vide : tels sont les thèmes qui dominent ce récit tout en retenue et délicatesse dès qu’il est question des choses de l’empire du Soleil levant. Mythifiée à travers les compositions de Ginkaku-ji ou de Shisen-dō, la vision qui est donnée du Japon se résume très probablement à l’appréciation biaisée de la romancière, basée sur une volonté de sérénité et d’accord avec soi-même qui contraste avec la violence et l’ambiguïté des passions qui traversent Rose ou Paul, européens qu’ils sont.
Pour sa part, Kan Takahama suit une chronologie linéaire "végétalement" chapitrée et structure son album autour des silences si chers à l’art des parcs nippons. Au fil des rencontres et des visites, Rose sent naitre des émotions contradictoires que la mangaka traduit simplement tout en gardant un graphisme à la lisière de l’Orient et de l’Occident afin de mieux symboliser ces deux héros entre deux eaux.
Au travers de ses choix graphiques et de sa mise en scène, Une rose seule sait insuffler à la rencontre de Rose avec le Japon... et Paul, une forme de retenue teintée de pudeur qui en fait toute la singularité. Pas une grande BD, mais une belle histoire tout de même !
Les avis
Erik67
Le 07/07/2025 à 07:18:16
Certains diront qu'une jeune fille est une rose que les années effeuillent. D'autre diront également que la richesse d'une rose, c'est sa fragilité. Certes, une rose ne saurait naître d'un oignon. Ici, la rose est seule et c'est tiré d'un roman de Muriel Barbery.
Nous avons une chronique sentimentale sur une française, Rose 40 ans, qui visite la belle ville de Kyoto entre ses temples et ses magnifiques jardins japonais. Le cerisier en fleur n'est pas trop loin. La tasse de thé non plus !
En réalité, elle a été contrainte de venir pour la mort de son père qu'elle n'a pas connu et qui va lui transmettre un legs assez précieux. De l'agacement du début, elle va évoluer au milieu de ce décor exotique sur les traces de son père et cela sera assez intéressant à observer.
J'ai adoré la mise en page qui est fait à la manière européenne tout en conservant l'esprit du manga. On aura droit à de la colorisation qui donnera le plus bel effet à cet ouvrage. Tout est remarquablement soigné et la virtuosité du visuel sublime la puissance du récit.
A noter une narration particulièrement lente qui laisse le temps aux choses de s'infuser correctement. On se situe au milieu de la zen attitude et des temples bouddhistes !
Dans le genre récit initiatique, c'est plutôt réussi même si cela demeure assez conventionnel. En mon for intérieur, j'ai adoré car c'est tout à fait le genre de lecture qui peuvent nous faire comprendre beaucoup de chose sur la vie, l'amour, les souffrances, les sacrifices et même la mort.
C'est tout l'âme du Japon qu'on peut ressentir car comme dit le père dans sa dernière lettre, les français sont nourris d'une terre clémente et ils ne peuvent ressentir toute la tragédie d'un pays soumis au pire cataclysme que cela soit la bombe atomique, les tremblements de terre et autres tsunamis dévastateurs.
Le miracle, c'est de transformer tout ce négatif en quelque chose ressemblant à un paradis paisible au gré des temples et des jardins de cet archipel. Oui, au-delà de la tragédie, il y a de la beauté en ce monde !
Je ne suis pas resté indifférent, bien au contraire, si l'action n'est pas une priorité, une lecture s'impose.