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ose est à Kyõto pour l’enterrement d’un père qu’elle n’a jamais connu ! Ici plus qu’ailleurs, elle peine à s’épanouir. La colère, la rancœur, l’absence tressent encore et encore le fil de son existence. Que fait-elle donc ici ? Peut-être est-ce l’occasion de s’ouvrir à une nouvelle vie et de bouton devenir fleur ?
S’inspirant du roman éponyme de Muriel Barbery, Kan Takahama se livre à une délicate adaptation d’un récit qui se démarque par l’indicible des sentiments et une fascination pour l’urbanité kyotoïte ! Cela étant, quoi de mieux qu’une dessinatrice japonaise pour transposer une telle histoire ? Car au-delà du trait, il y a une symbolique qu’il convient de retranscrire sans en dénaturer la subtilité, ni la sensibilité. La mort, l’amour, la vie, le vide : tels sont les thèmes qui dominent ce récit tout en retenue et délicatesse dès qu’il est question des choses de l’empire du Soleil levant. Mythifiée à travers les compositions de Ginkaku-ji ou de Shisen-dō, la vision qui est donnée du Japon se résume très probablement à l’appréciation biaisée de la romancière, basée sur une volonté de sérénité et d’accord avec soi-même qui contraste avec la violence et l’ambiguïté des passions qui traversent Rose ou Paul, européens qu’ils sont.
Pour sa part, Kan Takahama suit une chronologie linéaire "végétalement" chapitrée et structure son album autour des silences si chers à l’art des parcs nippons. Au fil des rencontres et des visites, Rose sent naitre des émotions contradictoires que la mangaka traduit simplement tout en gardant un graphisme à la lisière de l’Orient et de l’Occident afin de mieux symboliser ces deux héros entre deux eaux.
Au travers de ses choix graphiques et de sa mise en scène, Une rose seule sait insuffler à la rencontre de Rose avec le Japon... et Paul, une forme de retenue teintée de pudeur qui en fait toute la singularité. Pas une grande BD, mais une belle histoire tout de même !