Résumé: Par un été étouffant, alors que d'importantes restrictions d'eau frappent le Japon, une collégienne s'évanouit pendant un entraînement d'athlétisme. La jeune Chinami se réveille sur les berges idylliques d'une rivière aux eaux cristallines.
Autour d'elle, un village paisible, où seuls vivent encore un vieil homme et un petit garçon. Ce lieu mystérieux, qui lui semble étrangement familier, va petit à petit lui livrer ses nombreux secrets.
La plume légère et aérienne de Yuki Urushibara, déjà auteur du très remarqué Mushishi, nous dépeint un monde onirique et peuplé de fantômes du passé. Dans ce récit à mi-chemin entre Le Voyage de Chihiro et Quartier lointain, plusieurs générations de personnages tissent une histoire à l'ambiance unique, entre rêve et réalité.
U
n été caniculaire au Japon. Depuis qu'elle s'est évanouie en plein cours de sport, Chimani, jeune fille vivant dans une petite ville avec ses parents, fait de drôles de rêves. Toujours le même village, quasi-désert, dans lequel elle rencontre un jeune garçon prénommé Sumio accompagné de son grand-père. Ce village est apaisant, calme mais lui semble aussi étrangement familier. L'eau y est omniprésente sous de multiples formes : la pluie, une splendide cascade, une petite rivière. Elle y est essentielle à la population mais également dangereuse ou encore source de légende. Ces rêves et plus généralement l'état de la jeune fille inquiètent Kazumi, sa maman, et réveillent chez cette dernière de douloureux souvenirs qu'elle pensait oubliés. C'est en décidant de s'en ouvrir à Kiyoko, sa propre mère, qu'elle comprend qu'il est temps que les vieux secrets soient enfin révélés.
Avec Underwater, Yuri Urushibara propose un album poétique entre songe et réalité. Au-delà de Chimani, qui sert de déclencheur à l'histoire, le village est bien le véritable personnage central de ce récit. Épicentre des souvenirs et des destins qui se croisent, point de rencontres de toutes ces vies à des époques différentes, c'est le point d'ancrage de la trame. L'autre protagoniste essentiel, comme le titre de cet opus le laisse entendre, est bien entendu l'eau. En jouant sur les sentiments ambivalents inspirés par cet élément, l'artiste fait preuve d'une maîtrise narrative parfaite. Attirance-répulsion, manquante dans le présent / abondante dans le passé, vitale-dangereuse, limpide et claire-trouble et mystérieuse, l'auteure de Mushishi livre un premier tome à la fois ambigu et onirique.
Si, par les multiples changements d'époque qui s'enchaînent sans véritable transition, la narration peut sembler parfois confuse, l'aisance de la mangaka est telle que la fluidité n'en pâtit guère. De plus, chaque chapitre (six en tout) apporte un éclairage nouveau, complémentaire des précédents, et permet à l'ensemble de devenir cohérent. Prenant son temps pour développer son intrigue, elle laisse au lecteur le loisir d'apprécier le soin apporté aux magnifiques décors. Car les dessins sont aussi un point fort de ce manga. En offrant ces respirations contemplatives, là encore, l'auteure avec son trait fin, précis et léger invite à l'évasion.
Après le très bon Unlucky Young Men ou le poignant L'oiseau Bleu fin 2015, l'éditeur Ki-oon continue sur sa lancée avec une nouvelle mini-série remarquable. L'incluant dans sa collection Latitudes, il propose la version Deluxe japonaise - grand format (qui rend justice aux dessins) et grosse pagination. Un bel objet que le second tome viendra compléter le 10 mars prochain.
Les avis
Erik67
Le 05/09/2020 à 19:56:40
Quelque fois, dans la masse des mangas, je me demande pourquoi un titre retient plus l'attention du public qu'un autre. Etant un grand lecteur de manga, je peux affirmer que celui-ci n'est pas réellement différent de ceux que je lis habituellement pour être qualifié de chef d'oeuvre. L'attention sur un titre tient à peu de choses ou à une bonne publicité. En tout cas, je ne vous manipulerais point en vous disant que nous avons là le meilleur.
Alors, oui, c'est bien dessiné. Une certaine douceur se dégage de ce conte onirique mi-fantastique avec ce voyage dans le temps entre rêve et réalité sur des thèmes maintes fois exploités. On peut même parfois se tromper dans les personnages tant les visages se ressemblent. Il faudra être particulièrement attentif. Avouez que ce sont des choses qu'on ne vous dira pas forcément pour vous inciter à cette lecture et peut-être à un achat. Comme dit, ce n'est pas à un singe qu'il faut apprendre à faire la grimace.