A
vant de sortir, toujours vérifier son apparence dans un miroir, Émilio ne le sait que trop bien. Divorcé et la soixantaine qui s'annonce, ce ne sont pas des raisons pour se laisser aller. Son ami Giuseppe est loin de ces préoccupations bassement terre-à-terre. Veuf depuis cinq ans, il s'est plongé dans son métier de cordonnier et n'attend plus grand-chose du destin. Sûr de son pouvoir de séduction, Emilio veut lui démontrer le contraire mais il va finalement s'apercevoir que l'image ne fait pas l'homme.
Ceci n'est que le résumé de l'une des six histoires qui composent Un simple monde de Mari Marazaki. Avant de se fixer à Venise, l'auteure de Thermae romae et Pline a beaucoup voyagé. Le fruit de ses expériences humaines et géographiques s'exprime et s'apprécie dans chacune de ces tranches de quotidien. De l'Italie à la Syrie, en passant par Rio, les États-Unis, les îles Tuvalu et le Danemark, différentes couleurs et saveurs se trouvent ainsi développées avec, pour noyau, l'amour. La chair autour est constituée de thèmes universels et intimes tels que la vieillesse, les traditions, l'éloignement, pour n'en citer que quelques-uns : à vous de découvrir le reste. Le tendre optimisme qui se dégage donne chaud au cœur et reste réaliste. Mais attention, pas de guimauve ni de violons mais un ton juste empreint de subtilité et de sincérité. Le graphisme épuré et expressif va à l'essentiel afin de s'attarder sur les personnages et leurs émotions avec, pour situer et personnaliser le contexte quelques décors typiques.
L'art de la nouvelle est complexe et difficile : il faut réussir à parler, captiver et faire vibrer une corde sensible chez le lecteur en peu de pages. La mangaka Mari Marazaki prouve avec ce très beau recueil autour du monde qu'elle possède ce talent.