Résumé: Un homme comme une autre est l'histoire d'une mutation « contre-nature » vécue au quotidien, et le récit émouvant d'un individu qui, n'étant plus « un homme » au regard de la société, tente de garder le contact avec son enfant.
Yann développe depuis peu une transformation physique qui l'handicape chaque jour davantage, une incroyable mutation contre laquelle il n'y a ni remède, ni même le commencement d'une explication. Il se transforme, inéluctablement, en femme.
Comment inverser cette métamorphose ? Une collègue le pousse à lancer l'alerte sur les effets concrets des perturbateurs endocriniens. Mais Yann ne pense qu'à sa petite fille, Aïda.
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rêt, ça tourne. Plan fixe sur Yann. Est-ce bien lui ? Avec sa capuche sur le visage, sa voix aux inflexions étranges et l'obscurité de la pièce, difficile à dire. Néanmoins, la personne devant l'objectif commence sa confession : pas d'excuses mais des explications. Pourquoi la fuite et le silence ? Pourquoi le mystère ? Cette séquence, tournée il y a une dizaine d'années, Aïda ne la visionne que maintenant, à l'occasion de ses dix-sept ans. Changera-t-elle la vision qu'elle a de son père ?
Alors que L'arche de Neo est en cours, Stéphane Betbeder (Alice Matheson, Bunker) propose un one-shot avec son partenaire dessinateur, Federico Pietrobon (Deep, Escape this).
Récit d'anticipation avant tout, le scénario est riche en thèmes d'actualité : problème identitaire, soucis écologiques, vacillement psychologique, impact social, interactions relationnelles tendues… Le scénariste envisage, à partir d'extrapolations théoriques avérées, la mutation progressive d'un homme en femme, avec ses degrés de variations hormonales variés. En découlent des situations bien évidemment complexes, dramatiques et difficiles à vivre pour le personnage principal ainsi que ses proches, mais aussi la communauté médicale et scientifique. Après un début un peu longuet, le rythme s'emballe et la narration s'enrichit, devenant fluide. Le lecteur est alors happé par cet avenir possible et ses véritables problématiques. Quelques passages, ceux sur le travail du héros par exemple, alourdissent parfois le propos qui s'accompagne de digressions superflues. L'ensemble tient néanmoins bien la route et se révèle tout à fait intéressant.
Le style réaliste très épuré de Federico Pietrobon s'avère assez froid, avec des couleurs passées et un minimum de détails sur les visages et certains arrière-plans. Il faut avouer que cela n'inspire pas vraiment l'empathie pour cet être qui souffre pourtant dans sa chair et dans son âme. La mise en page reste très classique, l'émotion a du mal à passer.
«Un homme comme une autre» propose la vision d'un futur pas si lointain que ça et qui fait froid dans le dos. Du fait d'une mise en images bien trop ordinaire, il manque une dimension émotionnelle pourtant évidente cependant, le travail d'anticipation est excellent.