Info édition : L'auto-collant de couverture de la première édition cite par erreur un "tiré à part" alors qu'il s'agit d'un ex-libris car c'est un dessin original qui n'est pas extrait du récit publié. il est référencé dans la BEL para-bd comme "Ex-libris - Futuropolis" (ID 32674). Format 205 x 275 mm.
Résumé: Cervantès, Mike de son prénom, est un jeune homme plutôt paisible. Pour éviter de menus ennuis avec la police, il s’engage dans l’armée, et part comme GI en Afghanistan. Prisonnier des talibans, évadé, repris, maltraité, il est amputé d’un bras. Exactement comme cet autre Cervantès – Miguel de son prénom de baptême, auteur du célèbre roman publié en 1605, qui perdit l’usage de sa main gauche au cours de la fameuse bataille de Lépante le 7 octobre 1571. Révolté contre la société ultralibérale qui broie les vies des moins riches, Mike part en lutte pour plus de justice, endossant alors au volant de sa Ford Mustang le costume d’un Don Quichotte des temps modernes ! De retour en Arizona, Mike, comme beaucoup de ces « revenants » de la guerre, est déboussolé. Il devient irritable, entre violence et dépression. Révolté contre une société sans égard pour les faibles, fou de rage, il détruit une succursale de banque et se voit incarcéré. C’est au pénitencier où il purge sa peine qu’il découvre le roman chevaleresque et satirique de Miguel de Cervantès. C’est une révélation : Mike sera Don Quichotte à son tour, en butte à toutes les inquisitions contemporaines, économiques, politiques, intellectuelles ou religieuses, et en lutte contre toutes les formes d’injustice… Mike Cervantès n’écrira pas une version nouvelle de l’épopée du « chevalier à la triste figure » mais à bord de sa Rossinante rutilante, modèle 1971, il la vivra pleinement…
U
n peu paumé, un peu magouilleur, Mike Cervantès se retrouve en Afghanistan pour éviter la prison. Une échauffourée plus tard, il se réveille dans un hôpital, la main gauche en moins. De retour au bercail, il tente de se reconstruire à coup de bières. Évidemment, sa rééducation ne se passe pas exactement comme prévu et, lors d'un séjour en maison de correction, il découvre le chef-d’œuvre de son homonyme espagnol. Fasciné par Don Quichotte et dégoutté par ce qu'est devenu son pays, il décide de partir en croisade, au volant de sa Ford Mustang en guise de Rossinante. Les moulins à vent et autres géants du Far West ont du souci à se faire, ou pas.
Christian Lax (Sarane, L'écureuil du Vel'd'Hiv) porte un regard désabusé et cinglant sur les USA dans Un certain Cervantès. Par l'intermédiaire de Mike, il égraine les tares actuelles de l'Oncle Sam et repeint le rêve américain à la suie. Autant le dire tout de suite, le discours sent le déjà vu tant il a été rabâché : la guerre en Afghanistan, les problèmes psychologiques des vétérans à leur retour, la crise financière de 2007 et ses conséquences, le racisme, l'emprise des religions sur la vie publique, etc. Évidemment, histoire de contrebalancer ce triste état des lieux, la sagesse des Premières Nations est appelée à la rescousse et présentée comme l'exemple à suivre. Entre colère et nostalgie, le créateur du Choucas aligne ses désillusions (et pas mal de lieux communs) en faisant sombrer son personnage principal.
Si le fond est convenu, la manière se révèle originale, quoiqu'un peu bancale. En effet, l’obsession montante de Mike pour L’Ingénieux Hidalgo est finement décryptée. Alors que son équilibre intérieur tarde à se rétablir, l'ancien combattant coule, petit à petit, dans la folie et une identification de plus en plus troublante et destructrice. Par contre, le reste des éléments narratifs s'intègre nettement moins harmonieusement. La courte idylle avec Lynn, la prothésiste, l'apparition de Tranquillo Tobar, un émigré illégal qui prend involontairement le rôle de Sancho Pancha, le refuge chez les Navajos, la traque du FBI, etc. : sur la longueur, ces épisodes s'accumulent plus qu'ils ne se complètent. Résultat, l'album finit par perdre sa direction tant il mêle les genres, passant, au fil des pages, du drame psychologique au road-movie, sans oublier un soupçon de thriller et beaucoup de critique sociale.
Heureusement, au niveau graphique, Lax offre un véritable récital. Son trait virevolte littéralement dans les grandes compositions panoramiques (l'Afghanistan, Monument Valley, etc.), tandis que sa précision rend plus que tangible la rage et le désespoir du protagoniste principal. La mise en couleurs – en gris serait plus exact – à l'aquarelle est également admirable et donne aux planches une atmosphère tendue, mais juste.
Projet un peu trop ambitieux par moments, Un certain Cervantès s'égare parfois, mais se démarque par la maîtrise impressionnante de son dessinateur.
Les avis
Erik67
Le 30/08/2020 à 21:09:58
L'histoire de Don Quichotte a toujours fasciné les auteurs que cela soit au cinéma, dans la littérature ou dans la bande dessinée. Voici une version pour le moins réussi façon road-movie à l'américaine. Il y a certaines valeurs qui semblent avoir disparu dans un monde de plus en plus injuste. Je ne suis pas contre certains défenseurs qui vont jusqu'au bout.
Notre héros Mike Cervantès va ainsi relever tous les défis. On ne tombera pas pour autant dans une excessivité que l'on pouvait craindre. Cela reste dans le domaine du raisonnable en évitant le loufoque. Certes, les situations sont un peu originales mais c'était l'objectif. J'ai également bien aimé cette fin qui tombe un peu comme un cheveu sur la soupe à savoir ce côté inattendu. Le dessin est également très convenable.
C'est parfois un peu longuet mais cela peut faire passer le temps si on se trouve dans un TGV pour un interminable trajet.
supergast
Le 29/07/2015 à 08:52:21
Adaptation assez réussie un dessin NB assez exceptionnel , des personnages attachants, dialogues répondant aux questions de notre époque.
A lire et à faire découvrir.