Résumé: Ce volume reprend les épisodes suivants publiés entre 1968 et 1969 : « Le Réveil de Toar » , « Le Grand Combat », « La Matière verte » et « Tif rebondit », ainsi qu'un récit complet de six pages, « La Boîte à Tondu », publié précédemment dans la collection « Péché de jeunesse ».
Ce cinquième volume des intégrales de Tif et Tondu marque la fin de la collaboration entre Rosy et Will, après presque quinze années pendant lesquelles ils auront réalisé des épisodes mythiques. Rosy aura élevé très haut la série, qui peinait avant son arrivée à trouver sa place dans le cœur des lecteurs du Journal de Spirou. On lui doit la création de M. Choc, avec son masque et sa queue-de-pie, un méchant mythique de la bande dessinée franco-belge.
Seulement, à travers ces dernières histoires datées de 1968 et 1969, le scénariste évolue vers un humour plus anglais, basé sur l'absurde, qui convient mal à l'esprit de la série, tout du moins aux yeux de l'éditeur. Le diptyque La Matière verte et Tif rebondit, qui clôt ce volume, est aussi celui qui symbolise la scission. On est dans le fantastique le plus absurde, un ton qui symbolisera aussi l'humour de Maurice Rosy, de plus en plus décalé par rapport au reste de l'équipe du Journal de Spirou. Il passera ensuite la main à Maurice Tillieux qui marquera à son tour la série dans les années 1970.
L
a cinquième livraison de l’intégrale de Tif et Tondu correspond aux derniers scénarios de Maurice Rosy. En quinze ans et douze albums, ce dernier a marqué de son empreinte les aventures des deux nains. On lui doit notamment Choc, un méchant aussi mégalomane que Fantomas, mais élégant comme Arsène Lupin.
Dans les quatre épisodes présentés dans le recueil, la série semble se chercher, ce qui n’est pas forcément un reproche. Alors que l’excellent Réveil de Toar fleure la mythologie celtique, l’angoissant Grand combat, également remarquable, relève davantage de la science-fiction. Le diptyque La matière verte/Tif rebondit verse pour sa part dans un humour au premier degré. Le premier tome de cette histoire se révèle particulièrement faible, il se résume en une suite de gags mettant en vedette une boule verte indestructible et pratiquement impossible à arrêter quand elle commence à bondir. Il est dommage que la collaboration se termine sur cette note plutôt décevante. Le scribe cèdera d’abord sa place à Maurice Tilleux, suivront Stephen Desberg et Denis Lapière.
Les scénaristes passent, Will reste toutefois aux pinceaux jusqu’au début des années 1990. De son vrai nom Willy Maltaite, il est la quintessence de l’école de Marcinelle. Son dessin demeure sympathique, bon enfant, tout en rondeur, parfait pour le magazine Spirou. Le découpage en quatre bandes assure la lisibilité et s’il y a un doute, de petites flèches indiquent dans quel ordre lire les cases. Les couleurs d’origine apparaissent parfois surprenantes ; elles ont néanmoins leur charme vieillot. La comparaison avec Isabelle est tentante et cruelle, puisque c’est à cette époque que l’artiste crée cet univers moins convenu où il dévoile toute l’étendue de son talent.
Ces compilations vendues prix fort capitalisent sur la nostalgie des bédéphiles. Les éditions Dupuis le savent et font plaisir à leurs lecteurs en proposant un copieux dossier d’une cinquantaine de pages dans lequel Christelle et Bertrand Pissavy-Yvernault rappellent les conditions de création de ces récits en discutant avec des membres de la famille des auteurs et des confrères.
Les ficelles sont apparentes, les jeux de mots primaires et l’humour n’a pas nécessairement bien vieilli ; peu importe, ces fantaisies arrivent tout de même à faire sourire et rêver.