Résumé: Après avoir signé deux albums sur le Vendée Globe, Alexandre Chenet et Renaud Garreta ont suivi pendant plusieurs années Thomas Coville, l'un des plus grands skippers au monde et tentent de comprendre « ce qui peut se passer dans la tête d'un marin », notamment lors du tour du monde en solitaire record de 2016, engagé à bord d'un trimaran géant dans une quête d'ultime. Une bande dessinée qui se présente comme un documentaire passionnant et qui paraîtra à une période où l'actualité voile battra son plein avec des tentatives de Trophée Jules Verne et une nouvelle édition du Vendée Globe. Cet ouvrage s'adresse à tous les publics amoureux d'aventure et désireux de mieux comprendre cette formidable aventure humaine, technologique et sportive.
L
e 6 novembre 2016 Thomas Coville laisse la rade de Brest derrière lui. Seul sur un gigantesque trimaran, il s’élance pour la cinquième fois à la conquête du record du tour du monde en solitaire. Seul, mais épaulé par une équipe qui va lire la météo pour lui, surveiller sans cesse les parties sensibles du navire et l’observer, lui, dans son activité, son alimentation, son état de santé et son moral. Pourquoi se lancer dans un tel défi ? Qu’est-ce que naviguer en solitaire ? Quel est le quotidien d’un homme au milieu des déserts océaniques, lancé à pleine vitesse, obsédé par un record ?
C’est à ces questions, et à bien d’autres, que tente de répondre cet album consacré à ce périple fou. Alexandre Chenet, graphiste, voyageur, historien du Vendée Globe, et Renaud Garreta (Le Maître de Benson Gate) relatent cette aventure de sa conception, née de la lueur inondant le regard de Laurent Bourgnon qui venait de remporter la Route du Rhum, à son aboutissement, en passant par les tractations avec le sponsor, les préparatifs techniques, l’entraînement psychologique et l’affrontement avec les éléments. Le navigateur lutte contre les océans, les tempêtes, les vents capricieux, mais son ennemi le plus redoutable c’est lui-même, dans ses ambitions, ses excès, les choix à effectuer et la gestion de son impatience.
Le risque narratif était de se laisser happer par la linéarité de l’histoire et le danger de la répétition. Alexandre Chenet évite l’écueil en variant les narrateurs et les situations d’énonciation (dialogues, échanges de sms, monologue intérieur ou commentaires). Son récit alterne intelligemment entre questionnements stratégiques, exposés scientifiques et considérations philosophiques. Le lecteur partage ainsi l’expérience de l’épreuve physique, incarnée par la succession des empannages, les diverses réparations à effectuer ou le sommeil consommé par tranches de vingt minutes. Il est aussi initié aux différents dangers de la haute mer, tels que les collisions avec les cétacés, les rafales inattendues qui malmènent la structure ou le surgissement des growlers, énormes morceaux de glace détachés des icebergs.
Le dessin impeccable de Renaud Garreta oscille entre le réalisme des objets et la poésie des éléments, la précision des choses et le vertige des immensités. Quelques pleines pages ramènent le bateau lesté de son avant-garde technologique à la dimension du fétu de paille, ballotté au gré des dépressions et des courants. Sans surprise, le gris et le bleu dominent la palette graphique, brutalement déchirée par la couleur vive d’une combinaison ou d’un voyant lumineux.
Thomas Coville – La Quête de l’ultime raconte une aventure humaine, avec ses joies, ses larmes, ses espoirs, ses inquiétudes et ses découragements. La comédie et la tragédie s’y côtoient et s’y bousculent. C’est un périple qui dit un peu sur chacun. Tout lecteur trouvera dans son parcours personnel ce que peut signifier pour lui de vouloir naviguer aux limites du chavirage, parce que c’est là où on va le plus vite, là où on se sent unique.