Résumé: Début du XXe siècle. Bisons et Indiens ont déjà été quasiment exterminés par la marche de l’homme blanc des grandes plaines d’Amérique du Sud. C’est ici, au fin fond de la Patagonie, qu’Antoine et Maria Jiménez viennent travailler dans un ranch de gauchos, ces fameux cow-boys argentins. De nouveaux arrivants qui bousculent le quotidien de cet endroit sauvage où la vie est rude. Antoine, parce qu’il est peintre ; Maria, parce qu’elle est une femme. Très vite, les habitants du ranch perçoivent que le couple semble cacher des secrets inavouables. Qu’est-ce qui a bien pu les pousser à venir vivre ici, dans ce lieu austère et coupé du monde ?
F
in du XIXe siècle. Antoine est embauché dans une ferme en Patagonie où il se rend avec son épouse. L’homme se montre jaloux, violent, ivrogne et il déteste les Amérindiens. Il a tout de même une qualité : il peint de belles aquarelles. Lors de l’arrivée des conjoints, l’employeur suggère à Maria de ne pas rester dans ce pays où les femmes n’ont pas leur place. La vie est sévère dans cette bourgade où les ouvriers castrent les moutons avec leurs dents. Puis il y a cette bête qui s’attaque au bétail. Ce ne peut-être un ours, un loup ou un puma, ces animaux tuent pour se nourrir, pas simplement pour faire le mal. Loin de tout, le couple, déjà fragile, est mis à rude épreuve.
Au premier abord, Fred Bernard dépeint un triangle amoureux, un canevas somme toute classique. S’ajoute une rivalité raciale ; les blancs ont exterminé les autochtones, c’est du moins ce qu’ils croient. Il y a également le propriétaire des lieux, lequel tire les ficelles et cherche à protéger le tandem ; des autres, mais surtout de son autodestruction. Le récit propose un huis clos au milieu des grands espaces, là où les échos de lointains drames familiaux refusent de se taire, là où les tensions intercommunautaires et la lutte des classes persistent. Bien que le propos soit riche, l’auteur arrive à en extraire un scénario minimaliste, mais puissant, où tout n’a pas besoin d’être dit. Il n’hésite d’ailleurs pas à se faire discret pour laisser s’exprimer son complice Eddy Vaccaro.
Les illustrations de ce dernier sont très réussies, notamment les panoramas qui traduisent toute la beauté de l’extrême sud de l’Amérique. Une magnificence anguleuse exprimée par des coups de crayon autoritaires. Dans cet univers, les jours, les paysages et les cases se suivent et se ressemblent, deux dessins pleine page sont du reste quasi identiques… même les oiseaux ne bougent pas. Les images, un peu naïves, contrastent avec le réalisme des situations. Cela dit, loin d’être dérangeant, il renforce l’impression que les personnages sont des marionnettes plus ou moins maîtres de leur destin. Mentionnons enfin l’exceptionnel travail de mise en couleur d’Anne-Claire Jouvray qui se mêle habilement au fusain de l’artiste.
Une première collaboration convaincante entre deux bédéistes qui semblent partager une même sensibilité artistique.
Les avis
Yovo
Le 14/09/2019 à 12:46:38
Cette BD s’essaye à l’art délicat de la suggestion…mais n’y parvient pas.
Fred Bernard, habituellement plus inspiré, semble avoir construit son scénario sur du vide. Cet album ne raconte rien ou pas grand-chose et l’intérêt de cette histoire m’a complètement échappé. Victime d’une narration elliptique, les personnages aussi peu consistants les uns que les autres sont juste effleurés et le contexte qui aurait pu les faire exister n’est pas décrit. Rien de concret à se mettre sous la dent, pas même l’irruption bizarre d’une bête préhistorique, expédiée en 4 cases…
J’ai ressenti un énorme sentiment de gâchis. Tous les éléments d’un grand roman graphique étaient en place, à commencer par les décors grandioses de la Patagonie mais l’ensemble est morne, ennuyeux et dénué d’émotion. Il faut dire que le dessin d’Eddy Vaccaro qui enchaine lacunes et maladresses n’arrange rien. J’avais apprécié son trait sur "Championzé" mais là, ses cadrages naïfs, ses décors minimalistes et ses postures figées ont tristes mines. Lisez-le pour vous faire votre idée, moi je l’ai déjà oublié…