Résumé: Après des siècles d'obscurantisme et de persécutions, la figure de la sorcière fait un retour fracassant et positif dans notre société. Porté notamment par différents mouvements et personnalités écoféministes, la Sorcière d'aujourd'hui est au coeur des combats les plus brûlants de notre temps. Mais qu'est-ce qui amène une femme d'aujourd'hui à devenir et se revendiquer sorcière ? Dans son style enlevé et tout en douceur, Eva Roussel nous partage son parcours vers cette spiritualité et dresse un panorama de la sorcellerie contemporaine.
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va vient d’emménager à la campagne avec mari et enfant. Pour créer un lien avec sa nouvelle maison, quoi de mieux que d’en chasser les énergies négatives avec la poussière et de purifier les lieux avec de la sauge ? Grâce à une rencontre, la jeune femme a trouvé dans la nature et un choix spirituel singulier la voie qui lui convient. Entre balade dans la forêt, récolte d’herbes diverses pour confectionner des talismans ou orner un petit autel, collection de pierres aux nombreuses vertus, éveil aux croyances ancestrales païennes et à la Wicca, elle se rapproche insensiblement des pratiques de ces rebouteuses décriées. Le nez crochu et les verrues en moins.
Eva Roussel avait raconté sa transition écologique dans Tout va bien, enfin ça va aller, réalisé avec Bruno Isnardon. Dans Switch, paru dans la collection Mâtin ! chez Dargaud, elle propose de partager son rapport à la spiritualité, à la féminité et à son environnement. Elle le fait à travers le prisme de l’image de la sorcière, en adoptant le cycle des saisons et des fêtes celtiques. Le récit prend ainsi la forme d’un journal intime, à la fois introspectif et fournissant des explications sur l’un ou l’autre des points abordés.
Après un bref historique sur la sorcellerie, il est ainsi question des sabbats, d’animaux-ombres, de plantes, de lithothérapie, de cueillette, d’astrologie, de rituels et de l’influence que certaines lectures et rencontres ont eu sur l’autrice. Quelques recettes livrées invitent à être testées, et plus si affinités. Le tout est narré avec une dose d’humour bienvenu – notamment grâce à une araignée moustachue - et un dessin lâché aussi expressif qu’agréable. Le bédéphile appréciera d’ailleurs que l’artiste ne cherche jamais à imposer son point de vue, mais plutôt à témoigner du réconfort qu’elle trouve dans ses pratiques. Bienveillance et non malfaisance se reflètent parfaitement dans cette approche, ce qui n’empêche nullement Eva Roussel de se montrer circonspecte à l’endroit de certaines dérives. Par son côté édulcoré, l’album pourra toutefois décevoir les lecteurs à la recherche d’un discours plus incisif ou partisan.