Résumé: Une nouvelle ère de carnages et de sacrifices humains est arrivée.Janvier 1917. Pendant que l'Europe se déchire en boucheries guerrières, le Mexique entame sa huitième année de révolution, organismes de défense des paysans, comités de soutien aux grands propriétaires terriens, milices pro ou anti-américaines : toutes les sensibilités s'expriment avec violence dans ce pays troublé. Et c'est cet instant que choisit justement l'État-Major allemand pour débarquer dans le plus grand secret au Mexique afin de proposer à son président une alliance militaire contre la restitution des territoires annexés par les Américains. Menés par de bas intérêts humains et politiques, les dirigeants des deux pays vont sans le savoir réveiller la luttemillénaire entre Quetzalcoatl, le dieu serpent à plumes, et son ennemi juré Tezcatlipoca...
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anvier 1917. Craignant l’entrée des Etats-Unis dans la Première Guerre mondiale, l’Allemagne recherche de nouvelles alliances. Au Mexique, la guerre civile fait rage depuis la fraude électorale perpétrée en 1910 par Porfirio Díaz. Au large de Vera Cruz, quatre émissaires de l’Empereur Guillaume II, emmenés par la capitaine Hugo Von Kreutz, débarquent sur le sol mexicain. Leur mission diplomatique consiste à rallier le Mexique à la cause allemande. Les messagers, censés rejoindre l’ambassadeur Heinrich von Eckardt au palais présidentiel de Mexico, sont cependant faits prisonniers par un groupe de révolutionnaires dans le petit village de San Julio. Pendant ce temps, au milieu d’un rite honorant d’anciens dieux, la prêtresse Marina annonce l’arrivée du "Sixième Soleil".
Scénarisée par Laurent Moënard (Blues 46) et mis en image par Nicolas Otero (Amerikkka, Bonecreek), cet album inaugure une nouvelle série de la collection Vécu de Glénat. L’idée de base de cette saga s’inscrit d’ailleurs parfaitement dans cette collection qui invite à revisiter les origines de nos civilisations. Il y a d’abord un ancrage historique intéressant qui s’appuie sur le fameux Télégramme Zimmermann, envoyé par le ministre des Affaires étrangères de l'Empire allemand, Arthur Zimmermann, le 16 janvier 1917 à l'ambassadeur allemand au Mexique, Heinrich von Eckardt, au plus fort de la Première Guerre mondiale. Un message proposant une alliance contre les États-Unis en échange d’une aide financière et la restitution du Texas, du Nouveau-Mexique et de l'Arizona au Mexique (perdus lors de la guerre de 1846-1848). Il y a ensuite une guerre civile mexicaine peu abordée en bande dessinée malgré quelques guérilleros mondialement connus, tels que le célébrissime Pancho Villa. Mais la véritable originalité de cette uchronie est le fait d’y intégrer la mythologie aztèque. La croyance en un monde cyclique (différents mondes naissants à chaque fois du chaos situent le récit à l’aube du sixième monde) et dualiste (les combats entre les dieux ennemis Quetzalcóatl et Tezcatlipoca) est ainsi l’élément qui baigne ce western apparent dans un fond d’ésotérisme.
Malheureusement, la transition entre le début de l’histoire, qui a tout d’une mission d’espionnage au sein d’un pays déchiré par les affrontements entre révolutionnaires et forces gouvernementales, et une deuxième partie rythmée par les sacrifices humains d’une croyance ancienne, s’effectue de manière trop brusque et le mélange des deux ne deviendra jamais homogène. Les protagonistes, moyennement attachants et trop peu développés, ne parviennent pas non plus à accrocher le lecteur. La représentation fidèle à la réalité de personnages historiques méconnus, tels que le Président mexicain Venustiano Carranza Garza ou l’Empereur Guillaume II, ne comble que partiellement cette lacune. Le coup de crayon de Nicolas Otero réussi par contre à insuffler une touche personnelle à cette aventure historique au point de départ original, tout en lui offrant une grande lisibilité. Outre les quelques imprécisions du graphisme, c’est surtout la mise en page parfois exagérément acrobatique qui dessert le récit.
Un premier volet dépaysant au sein d’une période historiquement intéressante, mais qui mélange les genres de manière encore un peu brouillonne.