Résumé: « Vous atteindrez votre destination dans 14h. » annonce la voix laconique du GPS quand le journaliste le programme pour Ronin, où il doit rejoindre M. le Magicien. Alors qu'un déluge allonge son voyage, il prend en stop trois individus perdus et trempés sur le bord de la route. Eux aussi se rendent à Ronin pour la fête organisée pour l'annonce du grand retour du magicien. M. Le magicien... Qui est-il ? Qui est-il vraiment ? Un célèbre illusionniste disparu des écrans depuis plusieurs années ? Un mage aux pouvoirs surnaturels capable de faire s'envoler des navires ? Un homme étrange s'invitant dans vos rêves pour délivrer de mystérieux messages ? Ou un habile charmeur amateur de cartes et de conquêtes féminines ? Et si ce voyage en voiture sous la pluie était la clé de toutes ces énigmes ? Si M. le magicien n'apparaît que par le biais de la voix du héros, il transparaît comme un homme nébuleux aux multiples facettes qui sait pourtant manipuler son public et son image. Dans un récit ponctué de flashbacks à la Citizen Kane, le lecteur pensera souvent pouvoir dresser les contours de cet homme insaisissable. La parole du journaliste semble libérer le dessin de l'auteur qui imagine, lors de scènes grandioses, les tours de magie de M.
M
le magicien, le plus grand illusionniste de l’histoire, sort de sa retraite pour un spectacle-événement à Ronin. Un journaliste qui a obtenu une rare interview est en route pour cette bourgade afin de rencontrer le Maître. Chemin faisant, il prend en auto-stop trois hommes qui vont dans la même direction. Afin de meubler les silences, celui-là leur raconte la carrière du célèbre artiste.
Faux semblants, racontars et manipulations habiles, quand il s’agit d’illusions, la frontière entre l’avéré et le suggéré est souvent volontairement floue. Dans Showtime, Antoine Cossé (La baie des mutins ) joue la carte du roman à tiroirs pour mieux surprendre le lecteur. Malheureusement, ses effets de manche s’avèrent rapidement visibles, tandis que les ressorts de cette fable se révèlent passablement fatigués. L’idée de départ est pourtant amusante, presque intéressante, mais l’enchaînement des événements sent le déjà-vu et il y a fort à parier que peu seront surpris par le pot-aux-roses final.
Si le récit ne soulève guère d’enthousiasme, le traitement graphique est plus séduisant. Le dessinateur ose l’exploration et l’expérimentation. L’image se distord, coule et se fusionne alors que le temps et les scènes s’enchâssent. Évidemment tout ne fonctionne pas et certaines illustrations peuvent laisser dubitatif. Cependant, l’ensemble possède une cohérence et une certaine homogénéité. Dans ses essais et ses coups de pinceaux à la limite de l’abstraction, Cossé fait preuve d’un talent de défricheur incontestable.
Formellement plaisant, mais souffrant d’un scénario des plus ténus, Showtime n’est pas la représentation du siècle qu’il prétend être.