Info édition : Noté "Première édition". Format 215 x 286 mm.
Résumé: Paris, 2050. Depuis les purges qui ont suivi le changement de régime, les tensions sont loin d’être apaisées. Une organisation clandestine semble préparer une action spectaculaire. Reclus dans son minuscule appartement, Kader vit seul. Il ne parle à personne. Une injection de « Sérum », un produit psychoactif, l’empêche de mentir. Qu’il le veuille ou non, il ne peut dire que la vérité. Rien que la vérité. Toute la vérité. Cette malédiction fait de sa vie un enfer.
A
h, le bruissement des passants, le ballet des lumières, les avenues animées... Non, quelque chose détonne. Dans ce Paris-ci, les rues sont vides, tout est éteint et des checkpoints jalonnent régulièrement les trottoirs. Comme pour narguer le couvre-feu, l'aube pointe à l'horizon. Il est temps pour Kader de commencer l'inspection du champ d'éoliennes à l'orée de la capitale. Une routine fossilisante, des collègues insipides, tout est fait pour l'enfermer dans une solitude terne, interrompue seulement par ses visites nocturnes à Déborah sur holoporn. Si c'était ça le pire. Non, le plus pénible, c'est l'effet de la zanadrine. Une substance injectée en guise de sanction à certains crimes et qui inhibe le mensonge. Car oui, en 2050, la transparence est exigée ! Le gouvernement en place brandit la vérité comme un étendard et, de fait, gage d'une société parfaite. Mais charité bien ordonnée commence par soi-même. En effet, ce soit-disant idéal hypocrite ne fait pas l'unanimité : des slogans apparaissent sur les murs, des attentats perturbent l'ordre établi...
Continuant son exploration de l'Homme dans toute sa complexité, Cyril Pedrosa (Portugal, Les équinoxes) refroidit l'atmosphère en proposant une dystopie au thème glacé : la vérité absolue et omnipotente. Il plante le cadre de l'intrigue à une époque relativement proche, dans un environnement familier, ceci afin de faire résonner l'avertissement au plus près du lecteur. Au travers du registre politique mais aussi sentimental, l'auteur dévoile, d'une écriture sèche, le quotidien de son personnage, marionnette prisonnière de son honnêteté et manipulée de toutes parts car, il ne faut se leurrer, sous la façade des jolies prétentions, les vices cachés abondent. Délesté de la prétention d'une démonstration, cet exemple clinique de dérive en possède tous les arguments.
Nicolas Gaignard va à l'essentiel : un style réaliste et simple, utilisant un trait nerveux qui ne s’embarrasse pas de fioritures ni de décors chiadés. Associé à une mise en page classique (gaufriers et grandes cases sur trois bandes) et une palette de couleurs restreintes, ce dépouillement et cette uniformité retranscrivent parfaitement l'ambiance générale aseptisée. Le résultat n'est pas forcément hautement esthétique mais très efficace. L'impavidité affichée des personnages fait froid dans le dos.
Cet ouvrage n''a pas pour ambition d'apporter une solution à un débat vieux comme le monde, mais bien de montrer, de façon intelligente et pertinente, qu'il n' y a justement pas de réponse. Croyez-le ou pas.
La preview
Les avis
Au Fil des Plumes
Le 11/02/2020 à 14:42:52
Kader est enfermé et sous haute surveillance. Il subit régulièrement une injection de Sérum qui l'oblige à dire la vérité et permet ainsi de contrôler ses faits et gestes. Obligé de se tenir à l'écart de la société, ce roman graphique nous raconte le moment où sa vie va basculer.
Le scénario de cette BD est d'une incroyable précision. Construit comme un roman d'anticipation, il nous longe dans un futur proche effrayant où le contrôle des esprits semble une priorité. À un rythme haletant, les événements s'enchaînent et sans nous en rendre compte, nous voilà embarqué dans une histoire hors norme. L'ensemble est bien construit et la tension grandit au fur et à mesure de la lecture. La fin est surprenante, je ne m'y attendais vraiment pas.
Le personnage principal est Kader. Enfermé et connaissant un véritable mal être, le personnage ne met pas vraiment à l'aise. Tout est raconté de son point de vue et comme il vit un grand moment de confusion, cela contribue à créer du mystère autour de tous les événements qui se succèdent.
Autant le scénario a su me séduire de suite, autant je suis beaucoup moins conquise par l'esprit esthétique de ce roman graphique. Les traits sont durs et épais conférant une atmosphère lourde. Les couleurs sont très tranchées et manquent de nuance. Je n'ai donc pas vraiment accroché à l'esprit graphique de l'ensemble.
http://aufildesplumesblog.wordpress.com
Yovo
Le 14/08/2018 à 11:58:57
Pour décrire un monde sinistre situé dans un futur proche, les auteurs ont choisi un traitement extrêmement froid : écriture sèche, dialogue concis, palette grisâtre, décors minimalistes et personnages austères – à l’image de Kader, héros taciturne, qui affiche la même imperturbable tronche du début à la fin…
Pour autant, dans le genre anticipation, l’album s’en sort plutôt bien. Le sérum du titre par exemple, la zanédrine, est un sacré cauchemar !
Côté récit, c’est assez épuré : peu d’action et quelques ellipses mais il y a du rythme, des questions intéressantes font surface et des sursauts bien placés viennent dynamiser un peu l’intrigue.
Côté dessin, le trait nerveux de Nicolas Gaignard n’est pas très précis mais reste efficace ; il est surtout parfaitement raccord avec l’univers proposé.
Au final, un one-shot qui manque de coffre et d’ambition mais qui tient la route.
MediathequeMonaco
Le 20/12/2017 à 16:35:50
Cyril Pedrosa a déjà une longue carrière de scénariste derrière lui. Son album Portugal avait été salué unanimement par la critique et les lecteurs en 2011. Il signe donc, un nouvel album fantastique, un genre qu’il affectionne et qui lui réussit.
https://www.mediatheque.mc