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Rintintin & Rusty (2e série) du N° 68 au n°76
Résumé: Kirk est officier dans l'armée américaine. Il assiste à l'extermination d'un groupe de peaux-rouges. Suite à cet acte volontairement perpétré, il décide de déserter. Il prend alors la défense des Indiens et va se lier d'amitié avec Maha, un membre de la tribu des Tchatooga. Ce duo sera bientôt rejoint par Forbes, un médecin qui est aussi une sorte d'humaniste, et par Corto -un ancien bandit-. Ce quatuor va dès lors se mettre à combattre les exactions de tous genres... Dessiné entre 1953 et 1959 quand il était en Argentine, Sergent Kirk est l’œuvre la plus prolifique et la plus méconnue d’Hugo Pratt. Les scénarios sont signés d’Héctor Oesterheld, à qui l’on doit également Ernie Pike. Si l’on en croit le père de Corto Maltese, la série ferait 5000 planches au format du fascicule Misterix. En 1967, la série est remontée en un format plus classique, pour le magazine Italien Sgt Kirk (ou sera publiée pour la première fois La Ballade de la mer salée). Les textes d’Oesterheld sont réécrits par Hugo Pratt. Un dépoussiérage qui tient compte de l’évolution du dessin de Pratt, de ces préoccupations, mais aussi de l’évolution du western, qui grâce à un autre italien, Sergio Léone, change de peau. Résumé (ALBUM) : L’édition définitive intégrale de Sergent Kirk est enfin être disponible en langue française! Attendu par les fans d’Hugo Pratt depuis des années, Sergent Kirk est enfin réédité : 900 planches, qui seront publiées en 5 volumes, avec une qualité de reproduction exceptionnelle. Cette intégrale avait été supervisée et remontée par Hugo Pratt lui-même, qui n’avait pas hésité à réécrire des histoires, en 1967, pour le magazine italien Sergent Kirk. 30 ans après, cette version définitive paraît enfin en français. Le premier tome de cette intégrale est d’ailleurs entièrement inédit en français. En effet, il y a 25 ans, quelques albums du Sgt Kirk, ont été publiés, en commençant par la page 300, et avec une photogravure. douteuse. Ce sera donc pour l'amateur de Pratt, une véritable découverte.
L
’ouest américain, la frontière entre le monde des blancs et les dernières tribus indiennes. Face à la violence aveugle des siens, le sergent Kirk du 7e de cavalerie choisit la désertion. Adopté par les Tchatooga, il va se rendre compte que chez les Indiens, aussi, la vie n’est pas parfaite. Entre lutte interne et trahison, il va néanmoins lutter vaillamment contre une bande de hors-la-loi prêt à tout pour s’accaparer le filon de métal jaune situé sur le territoire tchatooga.
Après la guerre, comme beaucoup d’italien à cette époque, Hugo Pratt avait choisi d’émigrer en Argentine. Dès 1949, sous contrat avec un éditeur d’origine italienne, il se met à dessiner plusieurs séries, aujourd'hui oubliées, destinées au marché argentin. En 1953, il commence à travailler avec le grand scénariste argentin Hector Oesterheld (L’Eternaute, Mort Cinder) ; de cette collaboration naîtra, outre Sergent Kirk, Ernie Pike et Ticonderoga ; tous des héros populaires destinés à un large public. Cette période de travail est intense, car la demande est très forte, la qualité graphique passant souvent en second pour respecter les délais. Il est important de garder à l’esprit ce contexte général avant de ce lancer dans la lecture de Sergent Kirk.
Graphiquement, les débuts de cet album sont assez mitigés. Outre ses inévitables contraintes de temps, Pratt est encore en phase d’apprentissage et son trait n’est pas toujours assuré. Le dessin passe allègrement d’un style illustratif classique - sans doute recopié à partir d’illustrations américaines traditionnelles - à des cases plus hésitantes mais plus naturelles, plus lâchées. Le lecteur attentif peut y déceler les prémices graphique de se qui fera Corto Maltese un chef d'oeuvre du neuvième art quinze ans plus tard.
C’est au niveau du scénario que Sergent Kirk se démarque des récits de l’époque. A l’opposé des histoires traditionnelles du genre (gentils cowboys contre méchant indiens), Oesterheld a concocté un western social décrivant une réalité bien différente de celle de la légende de l’ouest. Un héros déserteur, une société indienne torturée, consciente de sa disparition prochaine, hésitant entre acceptation de son sort et un dernier combat sans espoir contre des blancs sans scrupules, prêts à tout pour accaparer les richesses de ces immenses territoires, les situations sont variées et les personnages contrastés. Sauf pour son héros tout-puissant, bande-dessinée populaire oblige, aucun camp ne sort vraiment gagnant : les Blancs sont soit cupides, soit, pour l’autorité (la cavalerie), dépassé par la situation et les indiens, malgré leur bon droit, n’hésitent pas à massacrer des innocents et à s’enfermer dans une spirale auto-destructrice.
Ce volume reprend la structure de la première édition italienne, supervisée par Pratt, de la fin des années soixante. Les planches avaient été remontées et les textes modernisés. Les originaux sont pour la plupart perdus, les films d’impressions dégradés et, malgré le soin apporté la publication de cet album, certaines pages sont vraiment très dégradées. Le choix pour le lettrage est le point le plus discutable, l’utilisation d’une police de charactère très fine rend la lecture fatigante.
Sergent Kirk représente un pan entier du début de la carrière d’Hugo Pratt resté longtemps indisponible. Cette intégrale ne peut donc que réjouir tous les amateurs du créateur de Corto Maltese. Espérons que Futuropolis, dans la lignée de feue la collection Copyright, continuera de proposer d’autres séries de l’âge d’or de la bande-dessinée.