Résumé: 25 février 1980. Roland Barthes est renversé par une camionnette. Et s'il s'agissait d'un assassinat ? Jacques Bayard, commissaire de son état, et Simon Herzog, jeune sémiologue, mènent l'enquête. Une enquête de routine qui se transforme rapidement en polar saisissant. Roland Barthes possédait en effet la septième fonction du langage, capable de convaincre n'importe qui de faire n'importe quoi dans n'importe quelle situation. Attisant la convoitise des plus grands intellectuels et hommes politiques, la septième fonction sème les cadavres sur son chemin. Tout le monde est suspect...
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Manifestement, il n’a pas compris le sujet. Pas plus que nous d’ailleurs, alors il tente de flamber à l’esbroufe. »
Le 25 février 1981, Roland Barthes est renversé par une camionnette. Un malheureux accident, c’est du moins ce qu’affirme la version officielle. Toutefois, le commissaire Jacques Bayard n’en croit rien. Il est certain que l’intellectuel a été assassiné parce qu’il a découvert la septième fonction du langage, une arme redoutable permettant de convaincre n’importe qui de faire n’importe quoi. N’y connaissant rien en sémiologie, il s’adjoint les services d’un jeune professeur. Le tandem mène une enquête au cœur de l’intelligentsia européenne.
Xavier Bétaucourt adapte avec aplomb un roman de Laurent Binet racontant une improbable investigation. De Paris à Venise en passant par Ithaca (État de New York), le rythme est endiablé. Sous ses airs de film de James Bond, le récit invite tout de même le lecteur à réfléchir à la doctrine philosophico-littéraire… pour mieux tourner en ridicule les Jacques Derrida, Michel Foucault ou Umberto Eco, lesquels se complaisent dans des joutes idéologiques farfelues, macabres et décadentes.
L’histoire évoque par ailleurs des phénomènes bien actuels ; comment ne pas penser à ce politicien aux cheveux orange, lequel, vociférant tout et son contraire, s'est vu confier les clefs de la Maison blanche. Et que dire des florissantes théories du complot. D’ailleurs, s’il était toujours vivant, le penseur y trouverait peut-être l’inspiration pour ajouter un chapitre à ses célèbres Mythologies.
Autre curiosité, les créateurs de l’album se sont mis en scène. Tels des admoniteurs, ils commentent l’action, soulignent un détail où discutent entre eux des ressorts narratifs ; à d’autres moments, les protagonistes leur dictent la suite des choses… comme s’ils maîtrisaient cette mystérieuse nouvelle propriété des mots et que les auteurs étaient tenus d'obtempérer.
Olivier Perret soutient le projet avec un dessin semi-caricatural, un peu relâché, mais d’une formidable efficacité. Les comédiens sont expressifs et les décors souvent dépouillés, à l’exception de bibliothèques, la chose n’est certainement pas fortuite.
Que le bédéphile étourdi par toutes ces considérations intellectuelles se rassure, cette bande dessinée est avant tout une poilade. Cela dit, s'il tient à se prendre la tête, il pourra se questionner sur le sens caché de l’émasculation de Philippe Sollers.