Résumé: Trois histoires, de solitude et d'urgence, une urgence qui saisit les protagonistes et que personne autour d'eux ne perçoit ou ne comprend. Et qui forment un beau récit choral et une délicate analyse des rapports humains. Katherine Mansfield passe quelques mois de l'année 1915 seule à Menton, à écrire des récits et des lettres, et à parler presque exclusivement à son frère. Celui-ci vient de mourir et lui apparaît parfois dans les jardins abandonnés ou dans la cuisine de la petite maison qu'elle occupe.
Liam est astrophysicien. Après un brillant doctorat, il choisit les travaux les plus éclectiques et apparemment subalternes plutôt que de rester à l'université où il se sent humilié et ne trouve pas sa place. Lorqu'enfin se présente le poste qui lui donnerait l'occasion de reprendre son travail de chercheur, il va devoir choisir entre son rêve et la vie avec celle qu'il aime. Marzia a 14 ans. Déjà trop vieille pour sortir indemne du procès où elle est accusée de fraude informatique.
Marzia est un petit génie du Web, elle passe tout son temps sur son smartphone où elle évolue sous moult identités différentes, toutes évidemment fausses ; elle s'est construit un discours complexe, très évolué pour son jeune âge, qu'elle déroule sans jamais regarder quiconque dans les yeux. Personne n'écoute ni ne croit Marzia. Et Marzia ne s'en soucie guère.
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rois. Non, quatre ! Ils sont quatre et Sauf imprévu est leur histoire. Enfin, manière de parler, car Rocio, Katherine, Liam ou Marzia développent, chacun à leur façon, une propension à se soustraire à l’attraction des autres et à se sentir seuls au milieu de tous.
Ancienne récipiendaire du Grand prix Artémisia 2018, Lorena Canottiere revient avec un récit choral qui, au travers de quatre trajectoires, démontre l’importance d’une certaine symétrie des échanges dans tout processus de sociabilisation.
Si de prime abord, le lien entre les différents protagonistes de ce roman dessiné interroge, au fil des planches, le dénominateur commun au quatuor apparaît progressivement. Partageant une même incapacité à tisser des liens solides avec ceux qui les côtoient, ils explorent leur propre voie dans cette Terra incognita qu’est l’interaction aux autres.
Pour l’occasion, l’autrice italienne opte pour un dessin coloré, façon crayonné. Toutefois, le récit de vie de chaque personnage possède sa propre sémantique graphique, se distingue par une phraséologie individualisée et bénéficie d’une colorisation spécifique. Mais progressivement, ces différences s’estompent et finissent par se fondre dans un final déconcertant.
Pour Roland Barthes, le langage caractérise l’Homme, et en voulant s'y soustraire, il court à sa perte. Pour Lorena Canottiere, le propos est moins tranché et elle tend à démontrer que, si certains éprouvent quelques difficulté a véritablement interagir avec leurs semblables, ils n'en sont pas moins capable de développer d'autres formes de communication, afin d’exister ailleurs et autrement !