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i>Le Sang des Porphyre est né d'une vieille envie, celle de Yann, alias Balac, de conter une histoire d'amour ayant pour cadre la Bretagne, sa Bretagne. Tout dans les deux premiers tomes dénote d'ailleurs de son attachement à cette terre rude, peuplée d'hommes qui ne le sont pas moins, et profondément ancrée dans ses traditions : les croyances populaires se mêlent à un christianisme omniprésent et personnifié par le recteur qui inspire à la fois crainte et respect, non par la force comme les jeunes coqs qui s'affrontent à la lutte, mais par ce qu'il représente. La peur du kornik sera toujours la plus forte, bien plus que le rejet de l'autorité par un peuple qui n'aime pourtant pas se voir mettre les fers aux pieds. Ce sentiment d'authenticité est merveilleusement rendu tout au long de l'histoire et s'appuie sur des personnages forts, sûrs d'eux-mêmes et de leurs convictions, revanchards en diable et prompts à faire face à toutes choses. Leur parler, très typé et regorgeant d'expressions du cru, renforce leur naturel sans nuire à la compréhensibilité de l'ensemble : de tels dialogues, si fins et si travaillés, font plaisir à lire quand on voit la déferlante actuelle de titres aux textes plus que négligés.
A n'en point douter, le dessin de Parnotte, choisi avec le plus grand soin par son compère scénariste, aide à rendre l'ambiance criante de vérité. Il renforce ainsi la personnalité des différents protagonistes en leur donnant un physique en parfaite harmonie avec leur caractère. Pas de clichés, toutefois, car c'est de nouveau le naturel qui l'emporte, et les personnages se fondent à merveille dans des décors d'une beauté stupéfiante. Balac aura certainement eu raison de faire confiance au dessinateur des Aquanautes et de Un pas vers les étoiles pour ne pas dénaturer la Bretagne qui lui est si chère : la nature y est forte, indomptable, tourmentée, et elle continue à dicter sa loi au genre humain. Faisant fi de leurs peines, la mer ne charrie-t-elle pas jusqu'à l'écœurement les naufragés qui viennent s'échouer sur la rive ? Les pieuvres et autres créatures marines ne sont-elles pas toujours un danger pour qui ose s'aventurer dans leur repaire ? Plus que jamais, l'homme est faible malgré sa force, il n'est rien malgré son orgueil démesuré.
Dès l'ouverture, l'ambiance est donc bel et bien présente, nous attirant comme par magie dans un univers graphique qui, s'il surprend par sa colorisation franche et lumineuse, séduit par un trait qui parvient à être appliqué sans tomber dans un maniérisme pesant si fréquent de nos jours. Cette simplicité apparente, renforcée par un bon rendu des mouvements et la grande expressivité des visages et des attitudes, ne sera jamais démentie. A tel point qu'on en oublierait de s'attarder sur le scénario à proprement parler. Balac reste ici dans l'esprit de Sambre, série mythique dont il avait signé le début avant de laisser Yslaire poursuivre seul, et reprend les mêmes ingrédients : un drame familial, une histoire d'amour qui se dessine progressivement, le jeu des rapports de force dans une société codifiée, la volonté de préserver un nom, et la fierté qui y est associée, en dépit de lourdes fautes et d'un passé trouble, etc. Le tout est jusqu'à présent parfaitement combiné, avec l'arrivée dans ce deuxième tome de nouveaux personnages. L'intrigue se met en place, donnant l'impression - pour le moins rassurante - que les auteurs savent parfaitement où ils veulent nous emmener : ils font également preuve d'un enthousiasme et d'une sincérité qui montrent à quel point ils sont attachés à leur création. Et si le rythme baisse un peu vers la fin, c'est pour mieux rebondir sur une dernière scène qui promet un prochain volume riche en révélations et rebondissements.
Depuis maintenant deux albums, l'intérêt de la première saga initiée par Balac n'est plus ce qu'il était, faute pour Yslaire de n'avoir pu s'arrêter à temps. C'est donc sans remords ni regrets que l'on troquera le dernier des Sambre pour le dernier des Porphyre, dont le destin n'a pas fini de nous passionner... et de nous émouvoir.
Les avis
wolfiz
Le 13/05/2013 à 22:38:43
Tel un bon vin , j'aime bien choisir ce qui va tomber dans mon escarcelle (de cheval) ; et ce soir on va causer genre tout de suite même d'une saga qui porte le doux nom du "Sang des Porphyre"; une série qui, l'air de rien, ne paie pas de mine (de crayon ... oui j'ai le jeu de mot facile aujourd'hui) mais qui est franchement bien (ah que c'est moi qui le dis). Je ne reviendrai pas sur le fait que, pour l'instant, j'ai pas beaucoup de temps pour lire des bd vu la quantité de romans et vu que vous vous en cognez super grave du coup, hop on passe fissa à ce qui nous intéresse; ze story!
Exercice on ne peut plus périlleux que de résumer sans trop spoiler 6 bd en one-shot mais mon deuxième prénom c'est "même pas peur" alors brandissons notre brioche et partons à l'assaut.
Justement et afin de situer l'histoire , le Sang des Porphyre c'est quoi ?!
C'est avant tout une saga, un conte familial se passant « kékpar » dans le Nord de la vieille France du XVIIIe siècle. La jeune et jolie Soizik vit et survit grâce au pillage des dépouilles échouées le long des côtes bretonnes lors de naufrages . Ce jour-là, elle trouve un collier qui attise plus que de raison son attention et afin de ne pas partager son butin, elle s'empressera de le cacher. Mais bien mal lui en pris car elle se retrouvera coincée dans une grotte au prise avec les tentacules gluantes d'une Morgaz, genre de pieuvre énorme . Ce n'est que grâce à Gwémon, un jeune adolescent et dernier descendant des Porphyre, qu'elle pourra en réchapper. Chemin faisant, un lien d'amitié naîtra entre ces deux loustics , et Gwémon lui montrera sa propre cache, une cavité perdue au fond des rochers et qui servait de repère à une famille bannie et maudite : les Porphyre ;
L'arrivée inopinée du frère de Gwénom, Konan (ex-bagnard) cherchant querelle, et d'Hermine de Rothéneuf venue de son coté enquêter sur un des naufrages ainsi que la disparition brutale d'une de ses aïeules ne fera qu'alimenter l'intrigue, la conspiration et le terrible héritage sur l'origine de chacun des personnages.
Voilà donc une série en 6 épisodes qui vous emmènera en terre bretonne avec son ambiance et sa romance si bien rendue. Même si j'avoue ne pas être un fervent défenseur du style graphique , j'avoue que celui-ci colle très bien à l'histoire et lui fait même honneur. Les couleurs, quant à ell,es jouent un rôle primordial faisant ressentir le climax et l'embrun qui circule dans l’air typique de la région. Il faut dire que le dessinateur, Joël Parnotte, nous balance des mises-en-scènes composées de paysages, décors et personnages consistants aux visages expressifs bien vivants et marqués par la vie ; le tout secondé par un scénario et une histoire superbement solide et documentée par Balac.
Moultes intrigues vous attendent donc dans cette histoire remplie de rebondissements réalistes, révélations et conflits familiaux qui devraient égayer l'oeil des plus voyeurs d’entre vous.
A noter tout de même un choix de couleurs qui pourrait déconcerter certains d'entre vous lors de votre première lecture (trop orangé par exemple sur certaines scènes mais c'est voulu et vous comprendrez si vous êtes déjà allés dans ces régions).
Saga composée de deux cycles; un premier qui est en fait une quadrilogie sur la famille Porphyre et un second qui est un diptyque qui se concentrera sur Hermines et les liens qui lieront , via des jeux de dupes, la familles des Porphyre avec celle d'Hermine Rothéneuf à travers un huis-clos des plus pittoresque et romanesque dignes des contes de l'époque.
Si comme moi vous aimez les bonnes histoires qui ne se passe pas sur les plages désertiques de Tchernobyl , Le Sang des Porphyre sent bon la houle, la moule et les crêpes au beurre salé et accompagnera très bien votre tisane et vos bains de pieds. Je vous en ressers une tranche où je vous mets le tout ?
http://lacasebd.overblog.com/porphyre
voltaire
Le 27/04/2008 à 09:18:39
Un ton au dessous par rapport au tome 1.
L'apparition du fils aîné des Porphyre, Konan qui donne son titre à l'album, relance certes l'histoire. Mais sa confession de la vie dans les galères tombe comme un cheveu dans la soupe.
Il n'en reste pas moins vrai que les dessins continuent de porter cette histoire laquelle dans ce deuxième tome connaît deux rebondissements: l'un avec la présence d'Hermine de Rothéneuf et du lourd secret qu'elle trimballe, l'autre avec l'arrivée des ex co-détenus de Konan.
Un dernier mot sur le choix des couleurs : grandiose
madlosa
Le 23/09/2007 à 11:16:19
J'attendais plus de ce second épisode, les personnages se perdent un peu dans l'histoire et les planches manquent de percussion. Elles semblent réunir plusieurs influences sans les sublimer, un peu de sortilège du Bois des brumes ou de Scorpion. On se surprend à suivre les malheurs de Konan de façon détachée devant des images déjà vues. Et poutant cette histoire possède tous les ingrédients pour nous exalter, peut-être dans le prochain volume ?