Résumé: César, le plus célèbre des "lions féroces" et figure incontournable du petit milieu du cirque, a offert son dernier tour de piste. Personne n'oubliera ses numéros sensationnels qui avaient conquis petits et grands du monde entier. Par petites touches, Daniel Blancou nous raconte l'ascension pas si évidente de César, qui était aussi le plus poltron des "lions féroces".
C
ésar, le Roi de la Savane, comme il aimait se faire appeler, n'est plus. Alors, ses amis du cirque Astropof, tout en rangeant ses affaires, se souviennent : ses débuts pas évidents dans la troupe et sa popularité grandissante... mais plus que tout son amitié avec ses compagnons... Elle est jolie, et fort bien racontée, cette petite histoire d'un lion chétif, né en captivité, qui rêvait d'être féroce. Riche en enseignements, aussi, cette vie contrariée, pas toujours facile à supporter dans une jungle urbaine sans pitié pour les plus faibles, qui verra un jeune garçon plein de rêves devoir composer avec une réalité beaucoup plus cruelle.
C'est César qui tient le haut de l'affiche, avec sa touchante naïveté et sa volonté semble-t-il inébranlable, et c'est autour de lui que s'articulent les retours en arrière qui s'égrènent au fil du récit. Mais il est bien entouré, entre les lions féroces et l'éléphant volant, en passant par le patron un peu retors mais pas vraiment méchant. L'ensemble présente une galerie de personnages hauts en couleurs, adorables ou détestables selon le moment, mais jamais totalement noirs ou blancs. La cohabitation entre humains et animaux paraît on ne peut plus naturelle et c'est à peine si l'on s'étonne de voir un dompteur converser tranquillement avec ses lions, ou encore toutes sortes de bébêtes plus ou moins rassurantes passer des castings pour gagner leur place au cirque. Ce petit miracle tient avant tout au caractère conféré à chaque personnage, quelle que soit son espèce, et aux préoccupations somme toute très humaines qui leur taraudent l'esprit. Tous ces protagonistes, différents les uns des autres mais rassemblés autour de leur passion pour le spectacle, forment un véritable microcosme où les relations se font selon les affinités de chacun... comme dans la vraie vie, en somme.
L'aspect purement visuel est une vraie surprise et une franche réussite. Le style de Daniel Blancou, un peu suranné, rappelle immanquablement les vieilles affiches de cirque au charme désormais désuet. Les couleurs volontairement délavées et l'impression sur un papier rugueux, qui semble lui-même assez daté, finissent de créer l'illusion : le voyage dans le temps peut commencer. Un voyage qui ne compte peut-être pas de véritable temps fort, de ceux dont on se souvient encore longtemps après, mais dont les quelques temps morts ne ternissent pas une impression générale plutôt amusante.
Après Les villes d'un jour, voici le deuxième album publié récemment qui a pour cadre le milieu du cirque. Le style est différent, tout comme le format et la présentation, mais le verdict est le même : à défaut d'être incontournable, il présente une originalité formelle et narrative qui en fait une belle découverte.